MOTU PROPRIO " SUMMORUM PONTIFICUM "
" Les Souverains Pontifes ont toujours veillé jusquà nos jours à ce que lEglise du Christ offre à la divine Majesté un culte digne, à la louange et à la gloire de son nom et pour le bien de toute sa sainte Eglise.
Depuis des temps immémoriaux et aussi à lavenir, le principe à observer est que chaque Eglise particulière doit être en accord avec lEglise universelle, non seulement quant à la doctrine de la foi et aux signes sacramentels, mais aussi quant aux usages reçus universellement de la tradition apostolique ininterrompue, qui sont à observer non seulement pour éviter des erreurs, mais pour transmettre lintégrité de la foi, parce que la Lex Orandi de lEglise correspond à sa Lex Credendi 1.
Parmi les Pontifes qui ont eu ce soin se distingue le nom de saint Grégoire le Grand qui fut attentif à transmettre aux nouveaux peuples de lEurope tant la foi catholique que les trésors du culte et de la culture accumulés par les Romains au cours des siècles précédents. Il ordonna de déterminer et de conserver la forme de la liturgie sacrée, aussi bien du sacrifice de la Messe que de loffice divin, telle quelle était célébrée à Rome. Il encouragea vivement les moines et les moniales qui, vivant sous la règle de saint Benoît, firent partout resplendir par leur vie, en même temps que lannonce de lEvangile, cette très salutaire manière de vivre de la règle, à ne rien mettre au-dessus de luvre de Dieu. Ainsi, la liturgie selon les coutumes de Rome féconda non seulement la foi et la piété mais aussi la culture de nombreux peuples. Cest un fait en tout cas que la liturgie latine de lEglise sous ses diverses formes, au cours des siècles de lère chrétienne, a été un stimulant pour la vie spirituelle dinnombrables saints et quelle a affermi beaucoup de peuples par la religion et fécondé leur piété.
Au cours des siècles, beaucoup dautres Pontifes romains se sont particulièrement employés à ce que la liturgie accomplisse plus efficacement cette tâche ; parmi eux se distingue Pie V, qui, avec un grand zèle pastoral, suivant lexhortation du Concile de Trente, renouvela tout le culte de lEglise, fit éditer des livres liturgiques corrigés et réformés selon la volonté des Pères, et les donna à lEglise latine pour son usage.
Parmi les livres liturgiques du rite romain, la première place revient évidemment au Missel romain, qui se répandit dans la ville de Rome puis, les siècles suivants, prit peu à peu des formes qui ont des similitudes avec la forme en vigueur dans les générations récentes.
Cest le même objectif quont poursuivi les Pontifes romains au cours des siècles suivants en assurant la mise à jour des rites et des livres liturgiques ou en les précisant, et ensuite, depuis le début de ce siècle, en entreprenant une réforme plus générale 2. Ainsi firent mes prédécesseurs Clément VIII, Urbain VIII, Pie X 3, Benoît XV et Jean XXIII.
Plus récemment, le Concile Vatican II exprima le désir que lobservance et le respect dus au culte divin soient de nouveau réformés et adaptés aux nécessités de notre temps. Poussé par ce désir, mon prédécesseur Paul VI approuva en 1970 des livres liturgiques restaurés et partiellement rénovés de lEglise latine ; ceux-ci, traduits partout dans le monde en de nombreuses langues modernes, ont été accueillis avec plaisir par les évêques comme par les prêtres et les fidèles. Jean-Paul II reconnut la troisième édition type du Missel romain. Ainsi, les Pontifes romains se sont employés à ce que cet édifice liturgique, pour ainsi dire, apparaisse de nouveau dans la splendeur de sa dignité et de son harmonie 4.
Dans certaines régions, toutefois, de nombreux fidèles se sont attachés et continuent à être attachés avec un tel amour et une telle passion aux formes liturgiques précédentes, qui avaient profondément imprégné leur culture et leur esprit, que Jean-Paul II, poussé par la sollicitude pastorale pour ces fidèles, accorda en 1984, par un indult spécial Quattuor Abhinc Annos de la Congrégation pour le Culte divin, la faculté dutiliser le Missel romain publié en 1962 par Jean XXIII ; puis de nouveau en 1988, par la Lettre apostolique Ecclesia Dei en forme de Motu Proprio, Jean-Paul II exhorta les Evêques à utiliser largement et généreusement cette faculté en faveur de tous les fidèles qui en feraient la demande.
Les prières instantes de ces fidèles ayant déjà été longuement pesées par mon prédécesseur Jean-Paul II, ayant moi-même entendu les Cardinaux au consistoire qui sest tenu le 23 mars 2006, tout bien considéré, après avoir invoqué lEsprit Saint et laide de Dieu, par la présente Lettre apostolique je décide ce qui suit :
Art. 1. Le Missel romain promulgué par Paul VI est lexpression ordinaire de la Lex Orandi de lEglise catholique de rite latin. Le Missel romain promulgué par Pie V et réédité par Jean XXIII doit être considéré comme lexpression extraordinaire de la même Lex Orandi de lEglise et être honoré en raison de son usage vénérable et antique. Ces deux expressions de la Lex Orandi de lEglise ninduisent aucune division de la Lex Credendi de lEglise ; ce sont en effet deux mises en uvre de lunique rite romain.
Il est donc permis de célébrer le sacrifice de la Messe suivant lédition type du Missel romain promulgué par Jean XXIII en 1962 et jamais abrogé, en tant que forme extraordinaire de la liturgie de lEglise. Mais les conditions établies par les documents précédents Quattuor Abhinc Annos et Ecclesia Dei pour lusage de ce Missel sont remplacées par ce qui suit :
Art. 2. Aux Messes célébrées sans peuple, tout prêtre catholique de rite latin, quil soit séculier ou religieux, peut utiliser le Missel romain publié en 1962 par Jean XXIII ou le Missel romain promulgué en 1970 par Paul VI, et cela quel que soit le jour, sauf le Triduum sacré. Pour célébrer ainsi selon lun ou lautre missel, le prêtre na besoin daucune autorisation, ni du Siège apostolique ni de son Ordinaire.
Art. 3. Si des communautés dInstituts de vie consacrée et de Sociétés de vie apostolique de droit pontifical ou de droit diocésain désirent, pour la célébration conventuelle ou communautaire, célébrer dans leurs oratoires propres la Messe selon lédition du Missel romain promulguée en 1962, cela leur est permis. Si une communauté particulière ou tout lInstitut ou Société veut avoir de telles célébrations souvent ou habituellement ou de façon permanente, cette façon de faire doit être déterminée par les Supérieurs majeurs selon les règles du droit et les lois et statuts particuliers.
Art. 4. Aux célébrations de la Messe dont il est question ci-dessus à lart. 2 peuvent être admis, en observant les règles du droit, des fidèles qui le demandent spontanément.
Art. 5, § 1. Dans les paroisses où il existe un groupe stable de fidèles attachés à la tradition liturgique antérieure, le curé accueillera volontiers leur demande de célébrer la Messe selon le rite du Missel romain édité en 1962. Il appréciera lui-même ce qui convient pour le bien de ces fidèles en harmonie avec la sollicitude pastorale de la paroisse, sous le gouvernement de lEvêque selon les normes du canon 392, en évitant la discorde et en favorisant lunité de toute lEglise.
Art. 5, § 2. La célébration selon le Missel de Jean XXIII peut avoir lieu les jours ordinaires ; mais les dimanches et les jours de fêtes, une Messe sous cette forme peut aussi être célébrée.
Art. 5, § 3. Le Curé peut aussi autoriser aux fidèles ou au prêtre qui le demandent, la célébration sous cette forme extraordinaire dans des cas particuliers comme des mariages, des funérailles ou des célébrations occasionnelles, par exemple des pèlerinages.
Art. 5, § 4. Les prêtres utilisant le Missel de Jean XXIII doivent être idoines et non empêchés par le droit.
Art. 5, § 5. Dans les églises qui ne sont ni paroissiales ni conventuelles, il appartient au Recteur de léglise dautoriser ce qui est indiqué ci-dessus.
Art. 6. Dans les Messes selon le Missel de Jean XXIII célébrées avec le peuple, les lectures peuvent aussi être proclamées en langue vernaculaire, utilisant des éditions reconnues par le Siège apostolique.
Art. 7. Si un groupe de fidèles laïcs dont il est question à larticle 5 § 1 nobtient pas du curé ce quils lui ont demandé, ils en informeront lEvêque diocésain. LEvêque est instamment prié dexaucer leur désir. Sil ne peut pas pourvoir à cette forme de célébration, il en sera référé à la Commission pontificale Ecclesia Dei.
Art. 8. LEvêque qui souhaite pourvoir à une telle demande de fidèles laïcs, mais qui, pour différentes raisons, en est empêché, peut en référer à la Commission pontificale Ecclesia Dei, qui lui fournira conseil et aide.
Art. 9, § 1. De même, le curé, tout bien considéré, peut concéder lutilisation du rituel ancien pour ladministration des sacrements du baptême, du mariage, de la pénitence et de lonction des Malades, sil juge que le bien des âmes le réclame.
Art. 9, § 2. Aux Ordinaires est accordée la faculté de célébrer le sacrement de la confirmation en utilisant le Pontifical romain ancien, sil juge que le bien des âmes le réclame.
Art. 9, § 3. Tout clerc dans les ordres sacrés a le droit dutiliser aussi le Bréviaire romain promulgué par Jean XXIII en 1962.
Art. 10. Sil le juge opportun, lOrdinaire du lieu a le droit dériger une paroisse personnelle au titre du canon 518, pour les célébrations selon la forme ancienne du rite romain, ou de nommer soit un recteur soit un chapelain, en observant les règles du droit.
Art. 11. La Commission pontificale Ecclesia Dei, érigée par le Pape Jean-Paul II en 1988 5, continue à exercer sa mission. Cette commission aura la forme, la charge et les normes que le Pontife romain lui-même voudra lui attribuer.
Art. 12. Cette commission, outre les facultés dont elle jouit déjà, exercera lautorité du Saint-Siège, veillant à lobservance et à lapplication de ces dispositions.
Tout ce que jai établi par la présente Lettre apostolique en forme de Motu Proprio, jordonne que cela ait une valeur pleine et stable, et soit observé à compter du 14 septembre de cette année, nonobstant toutes choses contraires. Donné à Rome, près de Saint-Pierre, le 7 juillet de lan du Seigneur 2007, en la troisième année de mon pontificat ".
Notes : 1 Ordonnancement général du Missel romain, 3 éd., 2002, n. 397. 2 Jean-Paul II, Lett. ap. : Vicesimus Quintus Annus, 4 décembre 1988, n. 3 : AAS 81 (1989), 899. 3 Ibid. 4 Pie X, Lett. ap. sous forme de Motu Proprio : Abhinc Duos Annos, 23 octobre 1913 : AAS 5 (1913), 449-450 ; cfr. Jean-Paul II, Lett. ap. : Vicesimus Quintus Annus, n. 3 : AAS 81 (1989), 899. 5 Cfr Jean-Paul II, Lett.ap. sous forme de Motu Proprio : Ecclesia Dei, 2 juillet 1988, n. 6 : AAS 80 (1988), 1498.
LETTRE DU PAPE AUX EVEQUES
Voici le texte de la Lettre que le Saint-Père a adressé à lépiscopat mondial à propos du Motu Proprio publié ce jour et intitulé Summorum Pontificum :
" Chers frères dans lEpiscopat,
Cest avec beaucoup de confiance et despérance que je remets entre vos mains de pasteurs le texte dune nouvelle Lettre Apostolique Motu Proprio Data, sur lusage de la liturgie romaine antérieure à la réforme de 1970. Ce document est le fruit de longues réflexions, de multiples consultations, et de la prière.
Des nouvelles et des jugements formulés sans information suffisante, ont suscité beaucoup de confusion. On trouve des réactions très diverses les unes des autres, qui vont de lacceptation joyeuse à une dure opposition, à propos dun projet dont le contenu nétait, en réalité, pas connu.
Deux craintes sopposaient plus directement à ce document, et je voudrais les examiner dun peu plus près dans cette lettre.
En premier lieu il y a la crainte damenuiser ainsi lautorité du Concile Vatican II, et de voir mettre en doute une de ses décisions essentielles, la réforme liturgique.
Cette crainte nest pas fondée. A ce propos, il faut dire avant tout que le Missel, publié par Paul VI et réédité ensuite à deux reprises par Jean-Paul II, est et demeure évidemment la Forme normale -la Forma Ordinaria- de la liturgie Eucharistique. La dernière version du Missale Romanum, antérieure au Concile, qui a été publiée sous lautorité de Jean XXIII en 1962 et qui a été utilisée durant le Concile, pourra en revanche être utilisée comme Forma Extraordinaria de la Célébration liturgique. Il nest pas convenable de parler de ces deux versions du Missel Romain comme sil sagissait de deux rites. Il sagit plutôt dun double usage de lunique et même rite.
Quant à lusage du Missel de 1962, comme Forma Extraordinaria de la Liturgie de la Messe, je voudrais attirer lattention sur le fait que ce Missel na jamais été juridiquement abrogé, et que par conséquent, en principe, il est toujours resté autorisé. Lors de lintroduction du nouveau Missel, il na pas semblé nécessaire de publier des normes propres concernant la possibilité dutiliser le Missel antérieur. On a probablement supposé que cela ne concernerait que quelques cas particuliers, que lon résoudrait localement, au cas par cas. Mais, par la quelques cas particuliers, que lon résoudrait localement, au cas par cas. Mais, par la suite, il sest vite avéré que beaucoup de personnes restaient fortement attachées à cet usage du Rite romain, qui leur était devenu familier depuis lenfance. Ceci sest produit avant tout dans les pays où le mouvement liturgique avait donné à de nombreuses de personnes une remarquable formation liturgique, ainsi quune familiarité profonde et intime avec la Forme antérieure de la Célébration liturgique. Nous savons tous quau sein du mouvement conduit par Mgr.Lefebvre, la fidélité au Missel ancien est devenue un signe distinctif extérieur ; mais les raisons de la fracture qui naissait sur ce point étaient à rechercher plus en profondeur. Beaucoup de personnes qui acceptaient clairement le caractère contraignant du Concile Vatican II, et qui étaient fidèles au Pape et aux Evêques, désiraient cependant retrouver également la forme de la sainte liturgie qui leur était chère ; cela sest produit avant tout parce quen de nombreux endroits on ne célébrait pas fidèlement selon les prescriptions du nouveau Missel ; au contraire, celui-ci finissait par être interprété comme une autorisation, voire même une obligation de créativité ; cette créativité a souvent porté à des déformations de la liturgie à la limite du supportable. Je parle dexpérience, parce que jai vécu moi aussi cette période, avec toutes ses attentes et ses confusions. Et jai constaté combien les déformations arbitraires de la liturgie ont profondément blessé des personnes qui étaient totalement enracinées dans la foi de lEglise.
Cest pour ce motif que Jean-Paul II sest vu dans lobligation de donner, avec le Motu proprio Ecclesia Dei du 2 juillet 1988, un cadre normatif pour lusage du Missel de 1962 ; ce cadre ne contenait cependant pas de prescriptions détaillées, mais faisait appel de manière plus générale à la générosité des Evêques envers les justes aspirations des fidèles qui réclamaient cet usage du Rite romain. A cette époque, le Pape voulait ainsi aider surtout la Fraternité Saint Pie X à retrouver la pleine unité avec le Successeur de Pierre, en cherchant à guérir une blessure perçue de façon toujours plus douloureuse. Cette réconciliation na malheureusement pas encore réussi ; cependant, une série de communautés a profité avec gratitude des possibilités offertes par ce Motu Proprio. Par contre, en dehors de ces groupes, pour lesquels manquaient des normes juridiques précises, la question de lusage du Missel de 1962 est restée difficile, avant tout parce que les Evêques craignaient, dans ces situations, que lon mette en doute lautorité du Concile. Aussitôt après le Concile Vatican II, on pouvait supposer que la demande de lusage du Missel de 1962 aurait été limitée à la génération plus âgée, celle qui avait grandi avec lui, mais entre temps il est apparu clairement que des personnes jeunes découvraient également cette forme liturgique, se sentaient attirées par elle et y trouvaient une forme de rencontre avec le mystère de la Très Sainte Eucharistie qui leur convenait particulièrement. Cest ainsi quest né le besoin dun règlement juridique plus clair, que lon ne pouvait pas prévoir à lépoque du Motu Proprio de 1988 ; ces normes entendent également délivrer les Evêques de la nécessité de réévaluer sans cesse la façon de répondre aux diverses situations.
En second lieu, au cours des discussions sur ce Motu Proprio attendu, a été exprimée la crainte quune plus large possibilité dutiliser le Missel de 1962 puisse porter à des désordres, voire à des fractures dans les communautés paroissiales. Cette crainte ne me paraît pas non plus réellement fondée. Lusage de lancien Missel présuppose un minimum de formation liturgique et un accès à la langue latine ; ni lun ni lautre ne sont tellement fréquents. De ces éléments préalables concrets découle clairement le fait que le nouveau Missel restera certainement la forme ordinaire du Rite romain, non seulement en raison des normes juridiques, mais aussi à cause de la situation réelle dans lesquelles se trouvent les communautés de fidèles.
Il est vrai que les exagérations ne manquent pas, ni parfois des aspects sociaux indûment liés à lattitude de certains fidèles liés à lancienne tradition liturgique latine. Votre charité et votre prudence pastorale serviront de stimulant et de guide pour perfectionner les choses. Dailleurs, les deux formes dusage du Rite romain peuvent senrichir réciproquement : dans lancien Missel pourront être et devront être insérés les nouveaux saints, et quelques-unes des nouvelles préfaces. La Commission Ecclesia Dei, en lien avec les diverses entités dédiées à lUsus Antiquior, étudiera quelles sont les possibilités pratiques. Dans la célébration de la Messe selon le Missel de Paul VI, pourra être manifestée de façon plus forte que cela ne la été souvent fait jusquà présent, cette sacralité qui attire de nombreuses personnes vers le rite ancien. La meilleure garantie pour que le Missel de Paul VI puisse unir les communautés paroissiales et être aimé de leur part est de célébrer avec beaucoup de révérence et en conformité avec les prescriptions ; cest ce qui rend visible la richesse spirituelle et la profondeur théologique de ce Missel.
Jen arrive ainsi à la raison positive qui est le motif qui me fait actualiser par ce Motu Proprio celui de 1988. Il sagit de parvenir à une réconciliation interne au sein de lEglise. En regardant le passé, les divisions qui ont lacéré le corps du Christ au cours des siècles, on a continuellement limpression quaux moments critiques où la division commençait à naître, les responsables de lEglise nont pas fait suffisamment pour conserver ou conquérir la réconciliation et lunité ; on a limpression que les omissions dans lEglise ont eu leur part de culpabilité dans le fait que ces divisions aient réussi à se consolider. Ce regard vers le passé nous impose aujourdhui une obligation : faire tous les efforts afin que tous ceux qui désirent réellement lunité aient la possibilité de rester dans cette unité ou de la retrouver à nouveau. Il me vient à lesprit une phrase de la seconde Epître aux Corinthiens, où Saint Paul écrit : Nous vous avons parlé en toute liberté, Corinthiens ; notre coeur sest grand ouvert. Vous nêtes pas à létroit chez nous ; cest dans vos coeurs que vous êtes à létroit. Payez-nous donc de retour ; ... ouvrez tout grand votre coeur, vous aussi ! Paul le dit évidemment dans un autre contexte, mais son invitation peut et doit aussi nous toucher, précisément sur ce thème. Ouvrons généreusement notre cur et laissons entrer tout ce à quoi la foi elle-même fait place.
Il ny a aucune contradiction entre lune et lautre édition du Missale Romanum. Lhistoire de la liturgie est faite de croissance et de progrès, jamais de rupture. Ce qui était sacré pour les générations précédentes reste grand et sacré pour nous, et ne peut à limproviste se retrouver totalement interdit, voire considéré comme néfaste. Il est bon pour nous tous, de conserver les richesses qui ont grandi dans la foi et dans la prière de lEglise, et de leur donner leur juste place. Evidemment, pour vivre la pleine communion, les prêtres des communautés qui adhèrent à lusage ancien ne peuvent pas non plus, par principe, exclure la célébration selon les nouveaux livres. Lexclusion totale du nouveau rite ne serait pas cohérente avec la reconnaissance de sa valeur et de sa sainteté.
Pour conclure, chers frères, il me tient à cur de souligner que ces nouvelles normes ne diminuent aucunement votre autorité et votre responsabilité, ni sur la liturgie, ni sur la pastorale de vos fidèles. Chaque évêque est en effet le modérateur de la liturgie dans son propre diocèse (cfr. Sacrosanctum Concilium, n. 22 : Sacrae liturgiae moderatio ab Ecclesiae auctoritate unice pendet : quae quidem est apud Apostolicam Sedem et, ad normam iuris, apud Episcopum).
Rien nest donc retiré à lautorité de lévêque dont le rôle demeurera de toute façon celui de veiller à ce que tout se passe dans la paix et la sérénité. Si quelque problème devait surgir et que le curé ne puisse pas le résoudre, lordinaire local pourra toujours intervenir, en pleine harmonie cependant avec ce quétablissent les nouvelles normes du Motu Proprio.
Je vous invite en outre, chers frères, à bien vouloir écrire au Saint-Siège un compte-rendu de vos expériences, trois ans après lentrée en vigueur de ce Motu Proprio. Si de sérieuses difficultés étaient vraiment apparues, on pourrait alors chercher des voies pour y porter remède.
Chers Frères, cest en esprit de reconnaissance et de confiance que je confie à votre cur de Pasteurs ces pages et les normes du Motu Proprio. Souvenons-nous toujours des paroles de lApôtre Paul, adressées aux prêtres dEphèse : Soyez attentifs à vous-mêmes, et à tout le troupeau dont lEsprit-Saint vous a établis gardiens, pour paître lEglise de Dieu, quil sest acquise par le sang de son propre Fils.
Je confie à la puissante intercession de Marie, Mère de lEglise, ces nouvelles normes, et jaccorde de tout mon cur ma bénédiction apostolique à vous, chers frères, aux curés de vos diocèses, et à tous les prêtres vos collaborateurs ainsi quà tous vos fidèles.
Fait auprès de Saint-Pierre, le 7 juillet 2007 ".
BXVI-LETTRE/MOTU PROPRIO/SUMMUN VIS 070707 (1890)
NOTE RELATIVE AU MOTU PROPRIO
La Salle-de-Presse du Saint-Siège a diffusé ce midi une Note explicative sur le Motu Proprio Summum Pontificum, dont voici les passages saillants :
Ce document magistériel " fixe de nouvelles règles pour lusage de la liturgie romaine antérieure à la réforme de 1970. Les motifs de ces dispositions sont clairement énoncés dans la Lettre daccompagnement du document que le Saint-Père a adressé à tous les évêques (via les Présidents des Conférences épiscopales et les Nonces apostoliques).
La mesure principale est que la liturgie romaine aura désormais deux modes :
a) Un mode ordinaire correspondant à la réforme de 1970 selon les livres promulgués par Paul VI, dont lédition officielle latine peut être utilisée partout et en toute circonstance dans les traductions vernaculaires établies par les Conférences épiscopales.
b) Un mode extraordinaire correspondant aux livres liturgiques édités par Jean XXIII en 1962.
Le paragraphe 8 précise que tout ordinaire peut ériger dans son diocèse une paroisse personnelle sil existe un nombre suffisant de fidèles réclamant la liturgie antérieure à la réforme. Il faudra que ce nombre soit consistant même sil ne saurait être semblable à celui des autres paroisses.
En conclusion, la Note rappelle les caractéristiques du Missel de 1962 : il est en latin et contient toutes les lectures (qui sont dans le Lectionnaire séparé depuis 1970), il ne compte quune prière eucharistique, le Canon romain (I du nouveau Missel qui en prévoit plusieurs), plusieurs prières de la messe (y compris grand part du Canon) sont récitées à voix basse par le célébrant), on lit le prologue de lEvangile de Jean à la conclusion de la messe, il ne prévoit pas la concélébration, ne dit rien de lorientation de lautel et du célébrant.
Commentaires:
Il est des décisions qui disent une théologie, une christologie, une ecclésiologie, qui continuent dévoluer au fil des siècles, quite à se retrouver en contradiction avec des pratiques plus anciennes.
Juste un exemple. Le choix du latin à Trente et louverture aux langues vulgaires à Vatican II traduisent deux conceptions : dans un cas, inutile au peuple de comprendre, lEsprit agit tout seul ;
dans lautre lEsprit agit également mais le chrétien devient "intelligent" dans sa relation à ses frères et à Dieu. Ce que rappelle à de nombreuses reprises la constitution sur la liturgie où il est écrit que la participation des fidèles doit être pleine, active et consciente.
Dune certaine manière, cest lopposition entre un certain obscurantisme et un esprit éclairé. Opposition que lon retrouve aujourdhui autour du mot mystère qui nest pas toujours compris de la même manière. Voir par exemple le discours où, quelques mois avant de devenir évêque de Bayonne, Mgr Aillet dit que la liturgie doit être opaque aux fidèles.
Il y aurait de nombreux autres exemples. En fait il y a une évolution dans la conception que lon se fait de lEglise (même si elle demeure Corps du Christ, heureusement !), il y a la question de la liberté religieuse, de loecuménisme, de louverture au monde, etc Tant déléments que rejettent nombre de lefébvristes. Rejeter ces éléments "pastoraux" permet-il dêtre malgré tout en pleine communion avec lévêque de Rome et lEglise du Christ ?
Il me semble quil y a un problème
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