LA LETTRE DE PIERRE À PHILIPPE

(NH VIII, 2) Traduit du copte par Jacques É. Ménard, révisé par Jean-Pierre Mahé Bibliothèque copte de Nag Hammadi,

Notes sur la Lettre de Pierre à Philippe

Adressé par Pierre à l’apôtre Philippe, cet écrit de neuf pages se présente superficiellement comme une lettre, comme Eugnoste, l’Apocryphon de Jacques et le Traité sur la résurrection. Sa forme et son contenu le rapprochent toutefois des dialogues de révélation gnostiques, comme le Dialogue du Sauveur, qui mettent dans la bouche du Christ ressuscité des enseignements typiquement gnostiques. En tant que lettre attribuée à Pierre, ce document se rattache à la tradition pétrinienne à laquelle appartiennent également la première partie des Actes canoniques des apôtres et les lettres du Nouveau Testament attribuées à Pierre, ainsi que quelques autre documents dont l’Évangile de Pierre et, à Nag Hammadi, l’Apocalypse de Pierre. D’autre part, en tant que dialogue de révélation entre le Sauveur ressuscité et ses disciples, il témoigne de la productivité des récits d’apparitions du Ressuscité aux premiers siècles chrétiens. On est donc là, à n’en pas douter, devant un document produit dans un milieu chrétien, et qui cherche à se situer au sein de traditions chrétiennes.

Le contenu doctrinal des enseignements mis dans la bouche du Sauveur et rapportés par Pierre porte sur la déficience survenue dans le Plérôme, le combat mené par les spirituels contre les puissances, et emprunte des formulations typiquement valentiniennes.

La formule de credo rapportée est remarquablement orthodoxe :

Notre illuminateur, Jésus, est descendu

et il a été crucifié,

et il a porté une couronne d’épine,

et il a revêtu un vêtement de pourpre,

et il a été cloué sur du bois

et il a été inhumé dans un tombeau

et il s’est ressuscité des morts.

Mais elle est immédiatement suivie d’une interprétation d’inspiration docète : «Mes frères, Jésus est étranger à cette souffrance, mais c’est nous qui avons souffert par la transgression de la Mère», qui n’est pas sans rappeler les enseignements relatifs à la passion contenus dans le Deuxième Traité du Grand Seth et l’Apocalypse de Pierre du Codex VII, de même que dans l’Évangile apocryphe de Pierre.

D’après les rapports de James M. Robinson et Stephen Emmel, un autre codex de papyrus, inaccessible pour le moment, contiendrait une seconde version copte de la Lettre de Pierre à Philippe.


1 Réception de la lettre

: « Pierre, apôtre de Jésus Christ, à Philippe notre frère bien-aimé et notre compagnon d’apostolat, et aux frères qui sont avec toi, salutations !

Je veux donc que tu apprennes, notre frère, que nous avons reçu des ordres de notre Seigneur et Sauveur de tout l’univers : que nous nous réunissions, afin d’enseigner et de prêcher sur le salut qui nous fut promis par notre Seigneur Jésus, le Christ.

Mais toi, tu te tenais à l’écart de nous et, tu n’as pas exprimé le désir que nous nous réunissions et apprenions de quelle façon nous répartir pour apporter la bonne nouvelle. Aussi, te plairait-il, notre frère, de marcher selon les ordres de notre Dieu, Jésus ? » Quand Philippe eut reçu et lu cette lettre, il vint aux pieds de Pierre, exultant de joie.

2. RÉUNION DES APÔTRES SUR LE MONT DES OLIVIERS)

Alors Pierre rassembla les autres aussi. Ils montèrent sur la montagne qui est appelée " Celle des olives", le lieu où ils avaient l’habitude de se rassembler avec le bienheureux Christ, quand il était dans le corps. Alors lorsque les apôtres se furent assemblés et mis à genoux, ils prièrent ainsi, disant: « Père, Père, Père de la lumière qui possèdes les Incorruptibilités, – écoute-nous comme tu t’es complu dans ton saint fils, Jésus Christ. Car il devint pour nous un luminaire dans les ténèbres. Oui, écoute-nous ! ».

Et ils se mirent de nouveau à prier, en disant : « Fils de la Vie, Fils de l’immortalité, toi qui es dans la lumière, Fils, Christ de l’immortalité, notre Sauveur, fortifie nous, puisqu’ils nous pourchassent pour nous tuer ».

Apparition de Jésus Christ et questions des apôtres

Alors apparut une grande lumière, de sorte que la montagne resplendît de cette manifestation. Et une voix retentit jusqu’à eux, disant :« Écoutez mes propos afin que je vous parle. Pourquoi me cherchez-vous ? Je suis Jésus Christ, qui suis avec vous pour l’éternité ».

Alors les apôtres répondirent et ils disaient : « Seigneur, nous voulons comprendre la Déficience des Éons et leur Plénitude, et encore leur Plérôme, et encore ceci : Comment sommes-nous retenus en cette demeure ? Comment sommes-nous venus en ce lieu ? De quelle façon en sortirons-nous ? Comment possédons-nous la licence de parler hardiment ? Pourquoi les Puissances nous combattent-elles ? » Alors une voix leur vint de la lumière, disant : « C’est vous-mêmes qui témoignez que je vous ai dit toutes ces choses. Mais à cause de votre incrédulité je vais parler de nouveau.

La déficience

Premier point : De la Déficience des Éons ( =des vivants). Voici ce qu’est la Déficience. Quand donc la désobéissance et la déraison de la Mère se manifesta contre l’ordre établi par la grandeur du Père, elle voulut susciter des Éons et, quand elle parla, apparut l’Authadès (=Celui qui se complaît en soi, le présomptueux). Puis, lorsqu’elle laissa une portion d’elle-même, l’Authadès s’en saisit, et cela devint une déficience. Telle est la Déficience des Éons. Et lorsque l’Authadès reçut une portion, il la sema et il établit des Puissances sur elle et des Autorités, et il l’emprisonna parmi les Éons morts. Et elles, toutes les Puissances du monde, se réjouissent d’avoir été engendrées. Cependant, elles ne connaissent pas Celui qui est préexistant, puisqu’elles lui sont étrangères. Mais, c’est celui-là l’Authadè qui a été doté de puissance et célébré par des louanges ! Or, lui, l’Authadès s’enorgueillit de la louange des Puissances. Il devint contrefacteur et il voulut modeler image pour image et forme pour forme. Et il chargea les Puissances sous son autorité de modeler des corps morts. Et ceux-ci tirèrent leur origine d’une contrefaçon de l’idée préexistante.

La Plénitude

Autre point : De la Plénitude. C’est moi, qui ai été envoyé dans le corps pour la semence qui est tombée, et je suis descendu dans leur ouvrage de mort. Mais elles ne me reconnurent pas ; elles pensaient que j’étais un homme mort. Et je parlai avec ce qui est mien. Et il m’écouta de la même manière que vous m’avez écouté aujourd’hui. Et je lui donnai pouvoir d’entrer dans l’héritage de sa paternité. Et je pris( .........) , il [fut empli], [ .........] dans son salut. Et puisqu’il état Déficience, il devint ainsi Plénitude.

Les liens de la corruption

Autre point : Du fait que vous êtes emprisonnés. C’est que vous êtes miens. Si vous vous dépouillez de la corruption, alors, vous deviendrez des luminaires au milieu des hommes morts.

Le combat contre les Puissances

Autre point : C’est vous qui devez combattre les Puissances C’est qu’elles ne se reposent point comme vous, car elles ne désirent pas que vous soyez sauvés ». Alors les apôtres se prosternèrent de nouveau, en disant : « Seigneur, enseigne-nous comment combattre les Archontes, puisque [es Archontes sont au-dessus de nous ». Alors une voix retentit jusqu’à eux, venue de Celui qui leur apparaissait, disant : « Quant à vous, voici comment vous les combattrez, – car les Archontes combattent l’homme intérieur –, vous donc, vous les combattrez ainsi : rassemblez-vous et enseignez dans le monde la promesse du salut et ceignez-vous de la puissance de mon Père et exprimez votre prière ; et lui, le Père, vous aidera comme il vous a aidés après m’avoir envoyé Ne craignez pas [ ] ainsi que je vous l’ai déjà dit lorsque j’étais dans le corps ». Alors vinrent du ciel un éclair et un coup de tonnerre, et Celui qui leur était apparu en ce lieu-là fut ravi au ciel.

3. RETOUR À JÉRUSALEM

Alors les apôtres rendirent grâce au Seigneur par toutes sortes de louanges, et ils rentrèrent à Jérusalem. Et, en descendant, ils échangeaient des propos en cours de route sur la lumière qui était survenue. Et l’on se mit à parler du Seigneur.

Discussion en route sur la souffrance

On disait : « Si lui, notre Seigneur, a souffert, à plus forte raison, nous ! » Pierre répondit en disant : « Il a souffert à cause de nous et il nous faut aussi souffrir à cause de notre petitesse ». Alors une voix parvint jusqu’à eux, disant : « Je vous ai dit bien des fois qu’il vous faut souffrir, qu’il faut que l’on vous mène dans des synagogues et devant)des gouverneurs afin que vous souffriez. Mais celui qui ne souffrira pas, non plus.(.........)!

Prédication de Pierre dans le temple

Mais les apôtres se réjouirent beaucoup et descendirent à Jérusalem, puis ils montèrent au Temple. Ils enseignèrent à être sauvé au nom du Seigneur Jésus Christ ; et ils guérirent une multitude. Et Pierre ouvrit la bouche, et il dit à ses disciples : « Assurément, notre Seigneur Jésus, quand il était dans le corps, nous a donné des signes de toute chose, car c’est lui qui est descendu. Mes frères écoutez ma voix . Et il fut rempli de l’Esprit Saint. Il parla ainsi :« Notre luminaire, Jésus est descendu et il a été crucifié et il a porté une couronne d’épines, et il a revêtu un vêtement de pourpre, et il a été cloué sur du bois, et il a été inhumé dans une tombe, et il s’est ressuscité des morts.

Mes frères, Jésus est étranger à cette souffrance, mais c’est nous qui avons souffert par la transgression de la Mère. Et ainsi, toute chose, il l’a accomplie semblablement en nous. Car le Seigneur Jésus, le fils de la gloire incommensurable du Père, est l’auteur de notre vie. Mes frères, n’écoutons donc pas ces hors-la-loi et marchons dans..............

4. EFFUSION DE L’ESPRIT ET MISSION DES APÔTRES

Pierre rassembla les autres apôtres en disant : « Notre Seigneur Jésus, Christ, toi qui es à l’origine de notre repos donne nous l’esprit de science afin que, nous aussi, nous accomplissions des miracles ». Alors Pierre et les autres apôtres furent doués de vision et furent remplis de l’Esprit Saint, et chacun opéra des guérisons et ils se répartirent pour annoncer le Seigneur Jésus. Puis ils se réunirent entre eux et ils s’embrassèrent en disant : « Amen ». Alors Jésus leur apparut en leur disant : « Que la paix soit avec vous tous et avec quiconque croit en mon nom. Et quand vous partirez, qu’il y ait en vous joie, grâce et puissance. Mais ne craignez pas : voici que je suis avec vous pour l’éternité ». Alors, les apôtres furent répartis en vue des quatre messages, pour prêcher, et ils s’en allèrent en paix dans la puissance de Jésus.

 
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