LE TRAITÉ TRIPARTITE

Traduit du copte par Louis Painchaud et Einar Thomassen .Bibliothèque copte de Nag Hammadi,  

constitue une véritable somme de théologie gnostique. Ce traité est, en effet, l’oeuvre d’un maître valentinien qui expose sa compréhension du système sur lequel l’Église valentinienne a fondé sa doctrine. Dans sa forme et son contenu, il correspond aux traités sur lesquels les hérésiologues Irénée e Hippolyte ont appuyé leur présentation de l’hérésie valentinienne.


TROISIÈME PARTIE : ESCHATOLOGIE

Les différentes opinions des hommes

La confusion apportée par les deux ordres inférieurs

Puisque l’un et l’autre des deux ordres, la droite et la gauche, sont réunis par cette pensée qui est placée entre eux et qui leur procure une économie commune, il leur arrive d’agir tous deux par un même zèle dans leurs oeuvres, la droite copiant la gauche et la gauche, à son tour, copiant la droite. Tantôt, lorsque l’ordre mauvais se met à faire le mal de façon insensée, l’ordre sensé rivalise avec lui dans le rôle de malfaiteur, faisant lui aussi le mal comme s’il était une puissance injuste. Tantôt au contraire, l’ordre sensé entreprend de faire le bien et l’ordre mauvais l’imite, en rivalisant pour en faire autant. Il en va de même pour les choses qui résultent de ces oeuvres : elles sont venues à l’existence portantl’empreinte d’oeuvres dissemblables, de sorte que ceux qui n’en ont pas été instruits sont incapables de comprendre la cause des choses qui existent. C’est pourquoi circulent les opinions les plus diverses : d’aucuns soutiennent que les réalités existantes existent grâce à une providence ; ce sont ceux qui observent la stabilité du mouvement de la création et son obéissance. D’autres prétendent que ces réalités sont étrangères à toute providence : ce sont ceux qui considèrent la diversité et l’anarchie des puissances et le mal. D’autres affirment que ce qui arrive est prédestiné : ce sont ceux qui se sont occupés de cette question. D’autres parlent de nature, d’autres encore, d’accident. Toutefois, la grande majorité en est restée aux éléments visibles et n’en connaît pas plus.

Les opinions des Grecs et des Barbares

En effet, ceux qui sont devenus sages à la manière des Grecs et des Barbares sont parvenu jusqu’aux puissances qui sont venues à l’existence par illusion et vaine pensée, et à celles qui sont issues de leur affrontement mutuel et de leur rébellion. Ils furent possédés par elles de sorte que leurs discours au sujet de ce qu’ils ont cru sagesse ne furent qu’imitation, présomption et pensée fantasque. Trompés par l’ imitation , ils ont cru avoir atteint la vérité alors qu’ils n’avaient atteint que l’erreur, non seulement à cause de l’insuffisance des noms, mais parce que les puissances elles-mêmes, pour leur faire obstacle, produisirent une imitation destinée à leur faire croire qu’elles étaient le Tout. C’est pourquoi cet ordre emmêlé combattit contre lui-même à cause de l’agressivité présomptueuse de …[ . . ]… l’archonte qui … ..[ . ].[ . ].. qui le précède. C’est pourquoi il n’y a nul accord, ni en philosophie, ni en médecine ni en rhétorique, ni en musique, ni en mécanique, mais il n’y a qu’opinions et théories. Il s’ensuit que le verbiage régna, et ils furent dans la confusion à cause de leur incapacité d’expliquer ceux qui les dominaient et inspiraient leurs pensées.

La pensée de ceux qui tirent leur inspiration d’un mélange du hylique et du psychique

Une partie de la production de certains Hébreux a été écrite sous l’influence des puissances hyliques qui reproduisaient le modèle des Grecs … alors qu’ils ont cru attribuer cette production toute entière aux puissances de la droite qui les meuvent tous pour qu’ils pensent avec leurs mots et leur image. Et ils entreprirent d’atteindre la vérité et rendirent un culte aux puissances mixtes qui les possédaient. Après cela, ils se rendirent jusqu’à l’ordre sans mélange de celui qui est établi comme unique, qui a été institué à la ressemblance du Père. Il n’est pas invisible en sa nature mais il est recouvert par une sagesse, de sorte qu’il reproduit le type du véritable invisible. C’est pourquoi de nombreux anges se sont trouvés incapables de le voir.

Les prophéties

Et d’autres hommes de la race hébraïque dont nous venons de parler, les justes et le prophètes, n’ont rien pensé ni rien dit par illusion ou par imitation ou par quelque obscure pensée. Attentif au contraire à ce qu’il vit et entendit sous l’impulsion de la puissance agissant en lui, chacun d’eux parla fidèle ment, tandis qu’un commun accord les réunissait entre eux, à la manière de ceux qui agissaient en eux dont ils reproduisirent l’ unité et l’accord mutuel, principalement par la confession de ce qui leur est supérieur. Et le Logos spirituel déposa dans leur pensée le besoin de quelque chose de plus grand qu’eux-mêmes, une semence du besoin de ce qui est en haut, une espérance et une attente. Cette pensée est la semence de salut et un logos illuminateur, et les justes et les prophètes dont nous avons déjà parlé en sont la progéniture et les émissions. Ils préservent la confession et le témoignage de leurs pères au sujet de ce qui est grand, car ils sont venus dans l’attente de leur espérance et dans l’obéissance du fait de la semence de prière et de quête déposée en eux. Celle-ci est déposée dans un grand nombre d’hommes qui en ont cherché la confirmation. Cette semence manifeste sa présence en les entraînant à aimer ce qui est en haut, à proclamer les prophéties comme ayant un seul objet.

Les différentes interprétations de prophéties

C’était un seul être qui agissait en eux lorsqu’ils parlaient ; leurs visions et leurs paroles varient pourtant à cause de la multiplicité de ceux qui les leur ont données. C’est pourquoi ceux qui ont écouté leurs paroles n’en rejettent rien, mais ils ont compris diversement les Écritures lorsqu’ils les ont interprétées. Ils ont formé de nombreux partis qui1 subsistent jusqu’à maintenant parmi les Juifs. Certains disent que c’est un seul Dieu qui a proclamé ces Écritures anciennes. D’autres disent qu’il y en a plusieurs. Certains disent que la nature de Dieu est simple et harmonieuse. D’autres disent que, dans son action, est réunie l’origine du bien et du mal. D’autres encore disent qu’il est l’artisan de ce qui est venu à l’existence, mais d’autres disent qu’il a oeuvré par l’intermédiaire de ses anges. [ . ] nombreuses hypothèses de cette sorte, c’est la multiplicité et 4 la diversité des Écritures qui leur ont donné < … > docteurs de la Loi.

L’oeuvre du sauveur

Les prophéties concernant le Sauveur

Les prophètes, quant à eux, n’ont rien dit par eux-mêmes, mais chacun d’eux a parlé à partir de ce qu’il a vu et entendu au sujet de la proclamation du Sauveur. Le sujet principal de leur proclamation, ce que chacun annonça au sujet de la venue du Sauveur, c’est son avènement. Mais parfois les prophètes parlent de lui comme si son existence était à venir, et parfois encore,ils s’expriment comme si le Sauveur parlait déjà par leur bouche, disant qu’il viendrait et ferait grâce à ceux qui ne l’auront pas connu. Ainsi ils ne se sont entendus sur rien ; mais chacun d’eux, en raison de l’influence qui le poussa à parler du Sauveur et du lieu qu’il lui arriva de voir, crut que c’était par elle qu’il allait être engendré et que c’était de ce lieu-là qu’il allait venir alors qu’aucun d’eux ne comprit d’où il viendrait ou de qui il allait naître. Mais la seule chose dont il leur a été accordé de parler, c’est ce en quoi il allait naître et souffrir. Par contre, ils n’ont rien connu de sa préexistence ni de son être éternel en tant qu’inengendré et impassible, qui n’ est pas le Logos venu dans la chair. Et voici ce qu’ils ont été inspirés de dire concernant sa chair qui allait apparaître : ils disent qu’elle est le produit commun de tous les êtres spirituels, mais avant toute chose, qu’elle vient du Logos spirituel qui est la cause de ce qui est venu à l’existence.

Celui dont le Sauveur a reçu sa chair avait conçu celui-ci à l’état de semence, lors de l’apparition de la lumière, telle une parole promettant sa manifestation — elle est en effet, une semence de ceux qui existent, mais elle a été produite en dernier. Mais c’est celui que le Père a chargé de la révélation du salut qui est l’accomplissement de cette promesse et il a été doté de tous les organes nécessaires à son entrée dans la vie physique. Il a cependant un seul et unique véritable Père, invisible, inconnaissable et insaisissable en sa nature, Dieu, qui par le seul effet de sa volonté et de sa grâce s’est donné lui-même pour être vu, pour être connu et pour être atteint.

L’incarnation du Sauveur et des spirituels

Notre Sauveur devint, par une volontaire compassion, ce que sont devenus, par le fait d’une passion involontaire, ceux pour qui il s’est manifesté : ceux-ci sont en effet devenus chair et âme, c’est la domination perpétuelle à laquelle ils sont soumis, et ils meurent dans la corruption. Mais ceux qui sont venus à l’existence invisiblement, comme un homme invisible, il les a instruits à son propre sujet tout aussi invisiblement. Non seulement il assuma la mort de ceux qu’il avait l’intention de sauver, mais il assuma aussi la petitesse dans laquelle ils descendirent lorsqu’ils sont nés , corps et âme, car il s’est soumis à la conception et il s’est laissé engendrer comme un enfant, corps et âme. Il a embrassé tout ce que ceux-ci partageaient avec ceux qui sont perdus, bien qu’ils possédassent la lumière tout en demeurant supérieur, car c’est sans péché, sans 16 tache et sans souillure qu’il se soumit à la conception. Le Sauveur a été engendré et est demeuré dans la vie physique parce qu’il avait été fixé que ceux-ci deviendraient, comme ceux-là, corps et âme à cause de la passion et du sentiment désordonné du Logos qui s’était mis en mouvement.

En vue de l’économie, le Sauveur assuma également ce qui est issu de la vision radieuse et de la ferme pensée du Logos lorsque celui-ci se convertit après son mouvement, comme nous l’avons déjà raconté. De la même, ceux qui sont venus avec le Sauveur reçurent avec le corps et l’âme, stabilité, fermeté et discernement. Leur venue avait été prévue en même temps que celle du Sauveur, mais ils ne vinrent que lorsqu’il en eut avisé. Dans leur émission charnelle, ils furent eux aussi supérieurs à ceux qui ont été produits dans la déficience, car c’est ainsi qu’ils furent émis concorporellement avec le Sauveur dans leur manifestation et leur union avec lui. Ce sont eux qui appartiennent à l’essence unique : c’est elle l’essence spirituelle. Par contre, l’économie est variable : elle est tantôt ceci, tantôt cela. Certains, issus d’une passion et d’une division, ont besoin de guérison. À d’autres, issus d’une prière pour la guérison de ces malades, on a a confié le soin de ceux qui sont tombés. Ce sont les apôtres et les porteurs de bonne nouvelle. Ce sont les disciples du Sauveur, mais ce sont des maîtres qui ont eux mêmes besoin d’instruction. Pourquoi donc ont-ils aussi partagé ces passions que partagèrent ceux qui sont issus d’une passion, si, conformément à l’économie, ils sont produits corporellement avec le Sauveur qui n’a pas partagé ces passions ?

C’est que dans le corps, le Sauveur était une image du Tout, qui est un. C’est pourquoi il a reproduit le type de l’indivisibilité par laquelle l’impassibilité existe. Mais eux sont des images de chacun de ceux qui sont apparus ; c’est pourquoi ils reçoivent de leur modèle la division, ayant été formés pour être implantés dans le monde inférieur, plantation qui partage elle aussi le mal qui existe dans les régions qu’ils ont atteintes. En effet, la volonté a maintenu le Tout sous le péché afin que, conformément à cette volonté, le Sauveur puisse être miséricordieux à l’endroit du Tout et qu’ils soient sauvés, car un seul est destiné à donner la vie, alors que tous les autres ont besoin d’être sauvés.

Par conséquent, c’est pour ces raisons que ceux que Jésus a jugés dignes d’assurer aux autres la proclamation ont reçu les premiers la grâce et le don de le proclamer. En eux est déposée en effet la semence de la promesse de Jésus le Christ, dont notre ministère annonce la manifestation et l’union. Cette promesse comportait leur instruction et leur retour à ce qu’ils sont depuis le début, dont ils possèdent une goutte de sorte qu’ils puissent y retourner ; c’est ce que l’on appelle la rédemption. Et c’est la libération de la captivité et l’acquisition de la liberté — la captivité de ceux qui étaient esclaves de l’ignorance qui règne en ses domaines. La liberté par contre est la connaissance de la vérité qui existait avant que ne fût l’ignorance ; elle règne éternellement, sans commencement et sans fin, elle est un bienfait, la réalisation du salut ; elle est libération de la nature esclave dont ont souffert ceux qui ont été produits par une pensée inférieure et vaniteuse, qui incline au mal et qui les fait succomber à l’amour du pouvoir. Par l’abondance de la grâce aux yeux tournés vers les enfants, ils ont reçu en partage la liberté qui renverse la passion et anéantit les effets causés par le Logos. Celui-ci les avait déjà écartés lorsqu’il s’était séparé d’eux, mais il avait reporté leur destruction à la fin de l’économie, leur permettant d’exister à cause de leur utilité pour les choses à venir.

Les trois races humaines

Les différentes réactions des hommes devant la lumière

L’humanité se divisa en trois sortes de natures, spirituelle, psychique et hylique ; elle reproduit ainsi le type de la triple disposition par laquelle le Logos produisit les hyliques, les psychiques et les spirituels. C’est à son fruit que l’on reconnaît l’essence de chacune de ces trois races, elles n’ont cependant pas été reconnues dès le début, mais seulement lors de l’avènement du Sauveur, qui a mis en lumière les saints et révélé ce que chacun était. La race spirituelle est en effet comme une lumière née de la lumière, et comme un esprit né de l’esprit. À l’apparition de la tête du Sauveur, elle se précipita aussitôt vers lui et aussitôt devint corps pour sa tête, et sur-le-champ elle reçut la connaissance par la révélation. Pour sa part, la race psychique, lumière issue d’un feu, a tardé à reconnaître celui qui s’est révélé à elle, encore plus à se précipiter vers lui avec foi. C’est plutôt par une voix qu’elle est instruite — cela leur suffit — et elle n’est pas éloignée de l’espérance née de la promesse, puisqu’elle a reçu, pour ainsi dire en guise d’arrhes, l’assurance des choses à venir. Mais la race hylique est complètement étrangère. Elle est comme les ténèbres qu’écartent les rayons de lumière. En effet, elle est détruite par l’apparition du Seigneur, parce qu’elle n’a pas accepté le surabondant éclat de sa lumière , et elle est remplie de haine à son égard à cause de sa manifestation.

La destinée des trois races

La race spirituelle recevra un salut complet à tous égards, mais la race hylique sera détruite à tous égards, comme un adversaire récalcitrant. Quant à la race psychique toutefois puisqu’elle est située au milieu en raison de son mode de production et que sa constitution est double en raison de sa disposition au bien et au mal, l’issue qui lui est réservée est incertaine … et l’entrée totale dans ce qui est bien.

La destinée des différentes catégories de psychiques

Ceux que le Logos produisit sur le modèle du préexistant, lorsqu’il se rappela ce qui est en haut et qu’il implora le salut, et qui appartiennent à son souvenir, ce salut leur appartient complètement sans incertitude. Ils seront sauvés à cause]de cette pensée salvifique, selon ce qu’elle produit en eux. Tel est également le cas pour ceux qu’ils ont produits, qu’ils soient anges ou hommes : selon qu’ils confessent, prient et cherchent celui qui leur est supérieur, ils obtiendront aussi le salut, comme ceux qui les ont produits, parce qu’ils sont issus de cette disposition bonne. Ils ont été assignés au service de la proclamation de l’avènement du Sauveur lorsque celui-ci était encore à venir et de sa manifestation après sa venue. Anges ou hommes envoyés pour ce service ont reçu de ce fait l’essence de leur être.

Quant aux psychiques issus de la pensée de l’amour du pouvoir, qui sont venus à l’existence dans l’assaut mené par ceux qui combattent, ils sont les produits de cette pensée. À cause de cela, le sort final de ces êtres mélangés sera incertain. Ceux qui auront été produits dans l’amour du pouvoir qu’ils exercent pour un temps et des moments, et qui rendront gloire au Seigneur de gloire et abandonneront leur colère, ceux-là recevront pour leur humilité la récompense de subsister jusqu’à la fin. D’autre part, ceux qui s’enorgueillissent à cause du désir de l’amour de la gloire et aiment la gloire temporaire sans être conscients que le pouvoir ne leur a été confié que pour le temps et les instants qui leur appartiennent, et qui, pour cette raison, n’ont pas confessé que le Fils de Dieu est le Seigneur du Tout et le Sauveur, et n’ont renoncé ni à leur nature colérique ni à l’imitation des mauvais, ceux-là seront jugés pour leur ignorance et leur irréflexion — qui est la souffrance. Ils seront jugés avec ceux qui se sont perdus, tous ceux qui, parmi les psychiques, se sont détournés et pis encore, de sorte qu’ils ont eux aussi commis contre le Seigneur ces indignités commises contre lui par les puissances de la gauche jusqu’à sa mort. Ils ont persisté dans la pensée qu’ils deviendraient les maîtres du

Tout si seulement était tué celui qui avait été proclamé roi du Tout. Ainsi se sont acharnés les hommes et les anges qui ne sont pas issus de la disposition bonne de la droite, mais du mélange. Et ils ont choisi volontairement pour eux-mêmes les honneurs passagers et la convoitise. C’est par l’humilité que passe le chemin du repos éternel conduisant au salut de ceux qui, parmi la droite, seront sauvés. Après avoir confessé le Seigneur, nourri la pensée de ce qui plaît à l’Église, et participé avec elle au chant 3 des humbles à travers tout ce qu’ils ont pu faire qui soit agréable à l’Église, de sorte qu’ils ont partagé ses afflictions et ses souffrances en tant que partisans fidèles du bien de l’Église, ils auront part à l’espérance — et ceci s’applique aux hommes et aux anges. De même, le chemin de ceux qui sont issus de l’ordre de la gauche les mène à la perdition, non seulement parce qu’ils ont renié le Seigneur, et tramé un sombre complot contre lui, mais aussi parce qu’ils ont dirigé leur haine, leur envie et leur jalousie contre l’Église elle-même. Et c’est la raison de la condamnation de ceux qui se sont agités et qui se sont portés à éprouver l’Église.

Le destin de l’élection et de la vocation

Introduction

L’Élection est concorporelle et consubstantielle au Sauveur ; à cause de son unité et de son union avec lui, elle ressemble à une chambre nuptiale, car c’est avant tout pour elle que le Christ est venu. Quant à la Vocation, elle occupe la place de ceux qui se réjouissent à propos de la chambre nuptiale et qui exultent et se félicitent de l’union de l’époux et de l’épouse. Le lieu de la Vocation sera donc l’éon des images, le lieu où le Logos ne s’est pas encore uni au Plérôme. Et c’est en cette union que l’Homme-Église est heureux, se réjouit et espère. Il fut divisé en esprit, âme et corps dans l’économie de celui qui a pensé …... L’Homme qui était en lui était unique, il est le Tout et tous sont en lui et il possède l’émanation provenant du Père dans la mesure où les régions sont capables de la recevoir.

Le salut des élus

Et il possède les membres que nous avons indiqués. Aussitôt que fut proclamée la rédemption l’homme parfait reçut la connaissance de façon à se tourner immédiatement vers son unité, vers le lieu d’où il est issu et à retourner dans la joie au lieu d’où il est issu, au lieu d’où il émana. Ses membres toutefois avaient besoin d’une école — celle-ci se trouve dans les régions inférieures qui sont pourvues de manière à ce qu’elle reflète les images et les archétypes comme un miroir. Ce besoin durera jusqu’à ce que tous les membres du corps de l’Église soient réunis et rétablis ensemble lorsqu’ils seront manifestés comme le corps intégral … ...... le rétablissement dans le Plérôme. Celui-ci possède un premier accord unificateur, l’accord existant pour la gloire du Père, si bien que les Touts en ont reçu une représentation. Son rétablissement final surviendra toutefois après que le Tout ait été manifesté dans le Fils, lui qui est la rédemption, la voie vers le Père incompréhensible, le retour au préexistant, et après que les Touts aient été manifestés authentiquement dans l’inconcevable et l’indicible, l’invisible et l’insaisissable, de telle sorte que le Tout reçoive la rédemption. Celle-ci n’est pas seulement une libération de la domination exercée par ceux qui appartiennent à la gauche, ou un affranchissement de l’autorité exercée par ceux qui appartiennent à la droite, dont nous avons pensé être respectivement les esclaves et les fils, et dont on ne s’affranchit pas sans être bientôt de nouveau à eux. Mais la rédemption est aussi une remontée et les degrés du Plérôme et tous ceux qui ont reçu des noms et qui les comprennent suivant la capacité de chacun des éons, et une entrée en ce lieu silencieux où il n’est nul besoin de voix, ni de compréhension, ni de pensée ni d’illumination mais où il n’y a que des réalités lumineuses par elles-mêmes.

Enfin, ce ne sont pas seulement les hommes terrestres qui ont besoin de rédemption, mais les anges ont aussi besoin de la rédemption et de l’image, de même que les plérômes des éons et les merveilleuses puissances lumineuses on ne doit pas en douter. Même le Fils, qui sert de modèle de la rédemption pour le Tout, a eu besoin de la rédemption lui aussi, lorsqu’il s’est fait homme, s’étant lui-même soumis à tout ce dont nous avons besoin, nous qui dans la chair sommes son Église. Donc, après qu’il eût reçu le premier la rédemption par le logos descendu sur lui, tous les autres qui l’ont reçu ont reçu par lui la rédemption. En effet, ceux qui ont reçu celui qui a reçu, ont aussi reçu ce qui était en lui. Car il est venu parmi les hommes qui sont dans la chair, pour apporter la rédemption, lui, le premier-né et l’amour du Père, le Fils venu dans la chair. Et les anges du ciel ont été jugés dignes de former en lui une communauté sur la terre. C’est pourquoi on appelle le Fils rédemption angélique du Père et consolation de ceux qui ont souffert pour le Tout en vue de la connaissance du Père, parce qu’il a reçu cette grâce avant quiconque.

Le Père le connaissait à l’avance car il existait dans sa pensée avant que rien ne fût, tout comme existaient également en elle ceux pour qui il l’a manifesté. Il logea la déficience dans ce qui ne dure qu’un temps et des instants, pour la gloire de son Plérôme. C’est parce qu’il est inconnu que le Père a pu montrer sa bienveillance en se faisant connaître, et ainsi, la réception de sa connaissance est devenue la manifestation de sa générosité et de sa surabondante douceur, qui est la deuxième gloire. C’est pourquoi il est lui-même à la fois cause de l’ignorance et auteur de la connaissance. En effet, par sa sagesse cachée et inaccessible, Dieu le Père, que personne n’a trouvé par sa propre sagesse ou capacité, a préservé la connaissance jusqu’à la fin, jusqu’à ce que les Touts aient peiné à sa recherche. Il se donne lui-même à eux afin que, pour sa plus grande gloire, ils reçoivent la connaissance par la pensée supérieure qu’il leur a inspirée et par ce moyen qu’il leur a procuré, qui est l’action de grâce sans fin qu’ils lui rendent. Depuis son immuable conseil, le Père inconnaissable dans sa nature manifeste éternellement cette connaissance à ceux qui se sont montrés dignes à ses yeux, de sorte qu’ils reçoivent sa connaissance par sa volonté.

C’était réflexion de la sagesse du Père que ceux dont il avait prévu qu’ils atteindraient la connaissance et ses bienfaits fassent aussi l’expérience de l’ignorance et de ses souffrances, afin qu’ils goûtent les choses mauvaises et qu’ils s’exercent par elles comme un ..[ . ].. temporaire, [ . . . . . . . . . . . . ] recevoir la jouissance des biens éternels. Le rejet constant et les accusations dont ils sont l’objet de la part de leurs adversaires les distinguent et les parent comme le signe merveilleux des choses d’en haut, pour qu’il devienne manifeste que l’ignorance de ceux qui ne connaissent pas le Père était leur propre fait, alors que c’est par sa puissance qu’il a donné à ceux qui l’ont connu la capacité de le connaître. On appelle à juste titre cette connaissance « la connaissance de tout ce qui peut être pensé » et « le trésor ». Pour tout dire, elle est la manifestation de ceux qui ont été connus à l’avance, et le chemin vers l’accord et vers le préexistant, et elle est la croissance de ceux qui ont renoncé à leur propre grandeur dans l’économie de la volonté divine, de sorte que la fin sera comme le commencement.

Quant au baptême authentique, en lequel doivent descendre les Touts et en lequel ils viendront à l’existence, il n’y en a pas d’autre hormis celui-là seul qui est la rédemption en Dieu le Père, le Fils et le Saint-Esprit, après la confession de la foi en ces noms qui forment un nom unique de la Bonne Nouvelle. Parce qu’ils ont cru en la réalité de ce qui leur a été enseigné, ceux qui croient en cette réalité obtiennent le salut en retour ; ils atteignent invisiblement le Père et le Fils, et le Saint-Esprit, parce qu’ils leur ont rendu témoignage dans une foi inébranlable et qu’ils les saisissent dans une ferme espérance. C’est ainsi que leur foi s’accomplit dans leur retour vers ces noms, et dans l’union du Père avec eux, le Père Dieu, lui qu’ils ont confessé dans la foi et qui leur a 18 accordé d’être unis avec lui dans la connaissance. Le baptême dont nous parlons est appelé « vêtement de ceux qui ne s’en dévêtent pas », car c’est lui que portent ceux qui le revêtent et qui ont été sauvés. Et on l’appelle « l’infaillible confirmation de la vérité » : fermement et immuablement, il saisit ceux qui ont été rétablis et ils le saisissent. On l’appelle « silence » à cause de sa quiétude et de sa tranquillité. On l’appelle aussi « chambre nuptiale » à cause de l’accord inséparable de ceux qu’il a connu et qui l’ont connu . Et on l’appelle encore « lumière qui ne s’éteint pas et qui n’a pas besoin de feu » car elle n’éclaire pas de l’extérieur, mais ceux qui la portent en eux et qu’elle porte en elle deviennent lumière. Et on l’appelle aussi « vie éternelle », c’est-à-dire l’immortalité. Et les noms de tous les délices qu’il contient s’appliquent à lui proprement, avec simplicité, sans division ni réduction, sans déficience ni fléchissement, et tout le reste. En effet, comment le désigner autrement, sinon comme « les Touts » ? C’est que, même si on lui donne des noms innombrables, ils ne servent qu’à en exprimer un aspect particulier, alors qu’il transcende tout mot et qu’il transcende toute voix, et qu’il transcende tout intellect, et qu’il surpasse tout, et qu’il surpasse tout silence. Il en est ainsi …... avec son caractère propre. Telle est en effet sa nature indicible et incompréhensible, qu’il fait sa demeure en ceux qui connaissent au moyen de ce qu’ils ont atteint, qui est ce à quoi ils ont rendu gloire.

Le salut de ceux qui sont appelés

Même s’il y aurait encore beaucoup de choses à dire au sujet de l’Élection, il faut toutefois que nous reparlions de ceux qui appartiennent à la Vocation — car c’est ainsi qu’on appelle ceux de la droite ; nous n’aurions pas profit à les oublier. Nous en avons parlé comme si la description limitée que nous en avons donnée suffisait. Comment en avons-nous traité partiellement ?

Eh bien voici. Tous ceux qui sont issus du Logos, soit de sa condamnation des mauvais, soit de sa colère contre eux, ou du fait qu’il s’en est détourné — c’est sa conversion aux choses d’en haut — ou de sa prière et de son souvenir des pré existants ou de son espérance et de sa confiance de recevoir le salut de ce qui est bon, tous ceux-là furent jugés dignes, parce qu’ils sont des êtres issus de ces bonnes dispositions, et qu’ils sont nés d’un sentiment issu de ce qui est.

En outre, avant le moment où le Logos s’est lui-même occupé d’eux de façon invisible par un acte de sa volonté, ce qui est supérieur leur procura, en raison de leur obéissance, une pensée qui est devenue cause de leur existence. Et ils ne s’exaltèrent pas de leur guérison, pour prétendre que nul n’existait avant eux, mais ils reconnurent qu’il y avait un principe à leur être et ils voulurent connaître ce qui existait avant eux. Ensuite, ils saluèrent l’apparition fulgurante de la lumière et ils portèrent témoignage qu’elle était apparue pour leur salut. Et ce n’est pas uniquement à propos de ceux qui sont venus du Logos que nous avons dit qu’ils atteindraient au bien, mais ceux qu’ils ont engendrés à leur tour, suivant les mêmes dispositions bonnes, auront part eux aussi au repos à cause de la surabondance de la grâce. Quant à ceux qui sont issus du désir de l’amour du pouvoir, et qui portent en eux la semence de l’amour du pouvoir, ceux d’entre eux qui ont oeuvré avec ceux qui ont une disposition au bien recevront la récompense des bons, pourvu qu’ils soient bien disposés et qu’ils veuillent abandonner l’amour de la vaine gloire passagère et qu’ils accomplissent les commandements du Seigneur de gloire au lieu de rechercher les honneurs passagers, et ils hériteront du royaume éternel.

Après ce retour nécessaire à ce que nous avons déjà dit, nous devons maintenant ajouter aux propos précédents concernant le salut et le repos de tous ceux de la droite, qu’ils soient mélangés ou non, les fondements et les illustrations de la grâce à leur endroit de façon à les joindre les uns aux autres. Cela rendra manifeste la nature de leur foi. De façon à établir ceci dans un discours, nous devons confesser que le royaume qui est dans le Christ abolit toute diversité, inégalité et différence. La fin en effet, connaîtra à nouveau l’unité, comme le commencement était un lieu où il n’y a ni mâle ni femelle, ni esclave ni homme libre, ni circoncis ni incirconcis, ni ange ni homme, mais le Christ est tout en tout. Comment celui qui n’était pas auparavant viendrait-il à l’existence, à moins que … ... la nature de celui qui n’est pas un esclave, puisqu’il prendra place avec un homme libre. Bien plus, ils recevront en effet la vision directe, de sorte qu’ils ne se fieront plus seulement à quelques paroles transmises au moyen d’une voix. Il en est ainsi, car le rétablissement dans ce qui était est unité. Même si certains furent exaltés à cause de l’économie, parce qu’ils ont été instaurés comme cause de ce qui est venu à l’existence, multipliant les forces physiques et se délectant en elles, ils]recevront, anges et]hommes, la royauté, la confirmation et le salut.

En voici les fondements : ceux qui sont apparus dans la chair ont cru sans hésiter qu’il était le fils du Dieu inconnu, dont on n’avait pas parlé auparavant et que personne n’avait pu voir. Et ils ont abandonné les dieux qu’ils avaient servis auparavant et les seigneurs des cieux et de la terre. Avant son ascension d’une part, même alors qu’il était encore un enfant, et qu’il avait déjà commencé à prêcher, ils ont rendu témoignage ; et une fois déposé dans le tombeau, comme un homme mort, les anges … , ils comprirent qu’il était vivant et ils reçurent la vie de celui qui était mort. Et ils vouèrent à un autre les nombreux cultes antérieurs et les gestes symboliques qu’ils exécutaient dans le temple. C’est la confession qui leur donne la puissance de faire cela parce qu’ils se sont hâtés vers lui. Ils ont reçu en effet ces institutions pour s’en départir au profit de celui qui ne fut pas honoré ici-bas, mais en échange, ils reçurent le Christ dont ils comprirent qu’il était d’en haut, du lieu d’où ils sont venus en sa compagnie, un lieu divin et seigneurial. Les noms qu’avaient reçus en prêt ceux à qui ils rendaient un culte, qu’ils soignaient et qu’ils servaient, furent attribués à celui qu’ils désignent légitimement.

Ce n’est qu’après son ascension que d’autres comprirent d’expérience qu’il était leur Seigneur, et qu’il n’était soumis à nul Seigneur. Ils lui rendirent leurs royaumes, ils se levèrent de leurs trônes, ils refusèrent leurs couronnes. Comme nous l’avons déjà mentionné, il se manifesta à eux pour des raisons de salut et de conversion à la bonne pensée envers [ . . . . . . ] [ . . . . . . ]. ami et les anges [ . . . . ].. et les nombreux bienfaits qu’ils ont accomplis envers elle. C’est ainsi qu’on leur a confié pour le bien des élus, la charge de rapporter au ciel les iniquités dont ceux-ci ont souffert pour qu’elles soient jugées pour l’éternité, d’un jugement sans appel et infaillible. Et ils demeurent à cause des élus jusqu’à ce que ceux-ci soient tous entrés dans la vie physique et qu’ils en soient resortis. Tant que les saints demeurent dans les corps sur la terre, les anges servent tous leurs [ . . . . ]., partageant leurs souffrances, leurs persécutions et les tribulations qui se sont accumulées sur eux plus que sur quiconque. Comme le mal mérite la destruction, les serviteurs du mal, < … > < … > avec fermeté à cause de ce mode de vie qui est au-dessus de tous les cieux et qui est leur bonne pensée et leur amitié. L’Église se souviendra d’eux comme de bons amis et de fidèles serviteurs lorsqu’elle aura reçu la rédemption, et elle leur donnera]en récompense la joie de la chambre nuptiale et la . . . . . . . qui est dans sa maison .[ . .. . . . ].. qui est dans cette pensée. . . …….et ce qu’elle doit .. . . le Christ qui est avec elle . . . . . attente du Père du Tout.

L’Église leur procurera des anges comme guides et comme serviteurs, car les éons se souviendront de la bienveillance que mirent ces bons amis à son service et ils leur accorderont la rétribution que méritent toutes leurs bonnes pensées. C’est leur émission, de sorte que, comme le Christ . . . volonté qui a apporté les sublimes grandeurs à l’Église, et les lui a données, à son tour aussi l’Église sera une pensée pour eux et leur donnera des demeures en lesquelles ils resteront éternellement, après qu’ils auront renoncé à l’attraction de la déficience, attirés vers le haut par la puissance du Plérôme grâce à la grande générosité et à la douceur de l’éon préexistant.

CONCLUSION : LA FIN DES TEMPS

Telle fut la nature de l’engendrement complet de ceux qui étaient avec lui lorsqu’il a brillé pour eux d’une lumière qui a manifesté .. . . . . …… comme son . . . . . . . . . . . qui sera . . . . . . . . .. comme son . . . . . . . la seule différence qui existe parmi ceux qui ont été …. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . ceux qui . . . . . . . . . au moyen de … . . . . . . . . . . . . . . . valeur comme je l’ai déjà expliqué, alors que les hyliques seront laissés à l’arrière jusqu’à la fin pour être détruits, car ils ne donneront pas leurs . . …. . S’ils sont retournés à nouveau à ce que . . ... . . comme ils . . . . . . . alors qu’ils n’existent pas . . . . . . mais ils ont été utiles . . pour le temps qu’ils ont été parmi eux, bien qu’ils . . . . . d’abord, alors . . . . . .. pour faire autre chose selon le pouvoir qu’ils détiennent dans l’établissement pour s’opposer à eux. Bien que je fasse en effet un constant usage de]ces paroles …. . sa pensée. Des … . . . . . . . . . . . . … . . . . . . . grandeur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . tous. . . . . . . anges . . . . . . . . . .. paroles au son de la trompe qui annoncera la grande réconciliation définitive dans l’orient resplendissant, dans la chambre nuptiale, qui est l’amour de Dieu le . . .. . . . selon la puissance qui … . . . . . . . . de la grandeur . . . . . . . . la douceur de . . . . . . . . à lui, alors qu’il se manifeste lui-même aux grandeurs . . . . . . . . sa bonté . . . . . . . . . . la louange, la puissance et la gloire par Jésus, le Christ, le Seigneur, le Sauveur, le Rédempteur de tous ceux qu’embrasse son amour miséricordieux, et par son Esprit saint dès maintenant à travers les générations des générations, pour les siècles . . des siècles. Amen.

 

Notes sur le Traité tripartite

Avec ses quatre-vingt-huit pages, le Traité tripartite est le plus long des écrits de la bibliothèque de Nag Hammadi qui nous soient parvenus dans un bon état de conservation. Il constitue une véritable somme de théologie gnostique. Ce traité est, en effet, l’oeuvre d’un maître valentinien qui expose sa compréhension du système sur lequel l’Église valentinienne a fondé sa doctrine. Dans sa forme et son contenu, il correspond aux traités sur lesquels les hérésiologues Irénée e Hippolyte ont appuyé leur présentation de l’hérésie valentinienne. Il fournit donc un accès direct à ce type de littérature, sans qu’il soit nécessaire de passer par l’interprétation, à certains égards tendancieuse, qu’en ont donnée les hérésiologues.

Bien qu’il ne fasse aucun doute qu’il ait d’abord été rédigé en grec, ce texte n’est connu que par cet unique manuscrit copte. Aucun autre témoin ne nous en est parvenu, et on n’en connaît aucune mention ou citation dans la littérature ancienne. Bien que l’oeuvre se situe à l’intérieur d’une tradition d’exposition systématique du valentinisme, l’auteur n’en demeure pas moins un penseur original qui s’intéresse davantage à la structure logique du système qu’il expose qu’au détail de sa mythologie. Il se considère lui-même comme appartenant à l’Église de la chair du Seigneur et il est attentif à expliquer sa conception de l’Église et la situation de celle-ci en ce monde. Que le traité ne se donne pas explicitement lui même pour valentinien n’a cependant rien d’étonnant puisque les valentiniens se considéraient d’abord et avant tout comme des chrétiens et ne faisaient que rarement référence à Valentin lui-même.

La comparaison du contenu avec les systèmes valentiniens décrits par les hérésiologues révèle un grand nombre d’expressions et de motifs communs. Parmi les plus caractéristiques, mentionnons : le partage de l’éon déchu en deux entités, dont l’une remonte au Plérôme ; la mission du Fils- Sauveur en tant que fruit commun du Plérôme ; et la tripartition entre le matériel, le psychique et le spirituel. Le recours à la catégorie intermédiaire du psychique pour attribuer une valeur positive au créateur du monde, au monde lui-même, aux Écritures juives, et aux autres chrétiens non valentiniens, est typique du valentinisme. Cette catégorie sert à distinguer l’Église valentinienne, elle même considérée comme spirituelle, des autres chrétiens et des juifs d’une part, et des groupes caractérisés par un dualisme et un anti-judaïsme radical, comme l’Église de Marcion et certains groupes gnostiques d’autre part.

La disposition du traité suit un modèle qui nous est bien connu par la présentation que font les hérésiologues du système valentinien, et dont on retrouve les principaux éléments dans certains traités gnostiques non valentiniens comme, par exemple, l’Apocryphon de Jean. Réduit à ses éléments fondamentaux, ce modèle comprend : 1° la description du Dieu transcendant et du Plérôme ; 2° la passion du plus jeune et dernier des éons ; 3° la mission du Sauveur et la création du monde ; 4° la création de l’humanité ; 5° l’avènement du Sauveur et 6° l’eschatologie. Ce modèle laisse cependant une large place aux variations individuelles.

L’importance du Traité tripartite ne tient pas seulement au fait qu’il permet de mieux comprendre un certain nombre d’éléments fondamentaux du système valentinien, mais elle tient aussi au fait qu’il nous permet d’observer jusqu’à quel point un maître pouvait donner sa propre perception du système, à partir de certains thèmes communs. Ce que les hérésiologues tournaient en dérision et présentaient comme des désaccords sans fin entre les hérétiques était en réalité l’expression d’un jeu constant sur ces thèmes communs et d’une méfiance à l’égard d’un vocabulaire figé qui aurait détourné l’attention des vérités transcendantes.


 
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