CHAPITRE 6

MAIS QUAND ? LE PÈRE SEUL SAIT


"Non pas le dieu des philosophes mais le dieu d'Abraham, d'Isaac et de Jacob " (Pascal)

SEUL LE PÈRE SAIT

C'est Jésus qui dit cela (Matthieu 24 . 36). Il le dit dans ce "discours eschatologique" (ou mieux : dans cette "prophétie") que nous rapportent les évangiles. Jésus y parle de son "avènement dans la gloire du Père", de la "fin des temps" et du dénouement divin de l'Histoire universelle. Il y répond aussi à la question de ses disciples sur la date exacte et sur le signe précurseur à connaître.

Quel malheur que cette indifférence, cet oubli ou ces contresens que font subir à cette prophétie la prédication et la catéchèse de nos églises !

Mais voici un extrait de ce texte :

"Comprenez cette comparaison empruntée au figuier : dés que ses rameaux deviennent tendres et que poussent ses feuilles, vous reconnaissez que l'été est proche. De même, vous aussi, quand vous verrez tout cela (cf v.29), sachez que le Fils de l'Homme est proche, qu'il est à vos portes.

En vérité, je vous le déclare, cette génération ne passera pas que tout cela n'arrive. Le ciel et la terre passeront, mes paroles ne passeront pas. Mais ce jour et cette heure, nul ne les connaît, ni les anges des cieux, ni le Fils, personne sinon le Père, et lui seul."

(Matthieu 24 . 32-36, trad. T.O.B.)

Ce qu'affirme Jésus est catégorique : le Père est le seul à connaître l'heure et le jour (c'est-à-dire la date exacte) de " l'Arrivée visible du Fils de l'Homme dans la plénitude de la puissance et de la gloire" (v.30), donc de la "fin" de "ce" monde-ci. Ce savoir est la prérogative de Dieu le Père. C'est son privilège absolu, c'est son pouvoir divin. "Le Père seul", affirme le fils, en fils soumis, et toujours subordonné à son Père.

Il en résulte, pour nous disciples de Jésus, deux conséquences pratiques : "Veillez... tenez-vous prêts" (v.42-44) en permanence.

Si vous désirez hâter l'arrivée de ce "Jour de gloire", faites-en la demande au Père lui-même !

MAIS QUE SAIT JÉSUS ?

L'aveu d'ignorance du Fils, nettement affirmée par lui, est relative : c'est la date, c'est "le jour et l'heure" de sa glorieuse Arrivée (Parousie) qu'il ne sait pas et ne veut pas savoir. Il laisse au Père la responsabilité et l'autorité "qui lui sont propres" (Actes 1 . 7). Et au lieu de "faire main basse" sur le Royaume, c'est au Père qu'il remettra et offrira ce Royaume une fois qu'à la fin "il aura détruit toute domination et toute puissance .. y compris la Mort" (I Corinthiens 15 . 24-27). Mais lui, il ne sait pas la date.

Or, s'il ne connaît pas le jour et l'heure que le Père est seul à connaître, il connaît par contre quelque chose d'une grande importance : la durée et les limites du temps qui devra s'écouler entre sa passion et le début des événements de la "Fin".

Il disait, en effet, juste avant sa déclaration sur son ignorance, cette phrase prophétique :

"En vérité je vous le déclare, cette génération ne passera pas que tout cela n'arrive" (v.34) phrase qu'on peut aussi traduire ainsi :

"Je vous le dis, c'est la vérité: quand cela arrivera, les gens d'aujourd'hui ne seront pas tous morts". (Matthieu 24 . 34 trad. en français fondamental)

Jésus savait donc, par la révélation du Saint-Esprit, qu'il ne faudrait pas plus d'une génération (la sienne) pour que commencent à se produire les événements de la Fin du monde. Or, le premier de ces événements annoncés est le "jugement dernier" de la "Maison de Dieu": le Temple, Sion, Israël. Il a eu lieu à partir de l'an 65, à la fin de la génération de Jésus.

Mais le second et "dernier" événement (visant la terre, les cieux et toute l'humanité: v.29 & ss) était attendu et espéré comme devant suivre de peu le jugement du Temple. Le jugement des "nations" devait, pensait-on, intervenir peu de temps après la "colère" du Seigneur contre son propre peuple. En somme, conformément aux visions d'avenir des prophètes d'Israël, Jésus et les siens voyaient comme un tout, d'un seul tenant et très proches dans le temps, les deux "jugements" successifs qui constituent le temps de la "Fin" de ce siècle : celui qui atteint Israël puis celui qui doit atteindre la création tout entière. Jésus voyait son avenir ainsi, n'étant pas éclairé sur la date. Et les évangélistes, rapportant sa prophétie, gardaient l'expression "tout cela" (v.34 et autres), même là où il aurait fallu distinguer le début de "tout cela" et la fin !

Par contre, connaissant le Père et son désir de tout sauver, Jésus répétait : "il faut d'abord que ...! (24 . 14).

 LA PATIENCE DU PÈRE

Le " Dieu des philosophes" n'est pas patient ; il n'éprouve pas d'émotions ni de passions ; il est impassible, il ne souffre pas ; il n'a pas de compassion, il ne se "repent" pas des châtiments qu'il avait décidés ; il ne connaît pas l'hésitation ni le déchirement intérieur; il est incapable "d'élection", "d'alliance" ou de "promesse",.... Bref, il n'est pas "amour", il n'est qu'un concept, une notion métaphysique, une abstraction.

Le Dieu des juifs, lui, est patient. Loin d'être " le cruel Dieu des juifs" que déteste Athalie (cf. son songe dans la tragédie de Racine), notre Seigneur Dieu est d'une patience qui nous paraît inadmissible.

Et voilà, au fond, la raison essentielle qui explique le "retard" (à nos yeux !) de la Fin de ce monde et de son Histoire bouleversante.

Dans les premiers temps de l"Eglise, un théologien philosophe, Marcion, voulait délivrer les chrétiens du Dieu de l'Ancien Testament (la Bible juive). Tout comme, actuellement, ce "théologien" qu'est Roger Garaudy.

Contre eux, citons un philosophe : Blaise Pascal. Vrai génie de la science et bon philosophe s'il en est ! C'est pourtant lui qui, à partir de sa conversion décisive à Jésus-Christ, n'a pas cessé de proclamer sa célèbre confession de foi : "Dieu, non point le dieu des philosophes mais le Dieu d'Abraham, d'Isaac et de Jacob .....

Il savait ce que la raison et la science ne peuvent pas savoir : il connaissait le Dieu vivant ! Et il le connaissait comme "le Père" : le Père du peuple juif et le Père de notre Sauveur, Jésus le Messie d'Israël. "Notre Père des cieux ....", c'est ainsi que Jésus nous enseigne à prier.

Mais les pages qui suivent ne veulent pas perdre de vue la grande question qui nous préoccupe : pourquoi donc notre Père tarde-t-il et a-t-il déjà "tardé " si longtemps à laisser descendre des cieux le Réalisateur du monde nouveau, Jésus son Fils ? Pourquoi l'heureuse fin du "siècle présent" n'a-t-elle pas encore eu lieu ? Qu'est-ce qui "retient" la glorieuse, l'ultime explosion de l'amour de Dieu pour notre monde ? 

LE PÈRE EST PATIENT

C'est sa nature ! Puisqu'il est AMOUR. Ce qui explique l'apparent "retard" de l'arrivée du Jour de Dieu, c'est la patience de Dieu. Il est patient.

A la question "pourquoi le retour et l'universelle manifestation du Christ n'ont-ils pas encore eu lieu?", il faut répondre : c'est à cause de la patience incroyable du Père.

Depuis longtemps, même depuis la fin du premier siècle, le Père aurait pu ouvrir les cieux pour laisser descendre et paraître son Fils, mettant ainsi un terme à l'Histoire du "siècle présent". Tout n'est-il pas déjà prêt depuis que le Roi et son Royaume sont " à la droite de Dieu", victorieux de la Mort elle-même ?

Mais Dieu est patient. Le Père de Jésus le Messie, notre Père, est patient. Il n'est pas "en retard" ! Nous, les humains, sommes parfois en retard, par exemple lorsque nous ne sommes pas partis à l'heure ou lorsque nous traînons les pieds. Mais Dieu, lui, sait ce qu'il fait lorsqu'il juge bon de prendre son temps : par amour, il patiente !

 

"Dans ces temps de la Fin viendront des sceptiques moqueurs qui diront : "où en est la promesse de son Avènement ? Car, depuis que nos pères sont morts, tout demeure dans le même état qu'au début de la création ! ..... En réalité les cieux et la terre actuels sont, par la Parole de Dieu, tenus en réserve pour le feu du jugement et gardés pour le jour du jugement et de la ruine des impies.

Mais pour le Seigneur, un seul jour est comme mille ans et mille ans comme un jour. Le Seigneur ne tarde pas à tenir sa promesse ! ! Il fait preuve de patience envers vous, ne voulant pas que quelques uns périssent mais que tous en arrivent à revenir à lui.

Mais le jour du Seigneur viendra comme un voleur, ce jour-là ... où la terre et les actions de ses habitants seront jugées ...

Car nous attendons, selon sa promesse, des cieux nouveaux et une terre nouvelle où habite la justice (de Dieu).... Donc, dites-vous bien que la longue patience du Seigneur, c'est votre salut".

(2 ème lettre de Pierre 3 . 1-15)

Note personnelle : Heureusement pour moi et pour mon épouse que Jésus n'est pas revenu au 19 ème siècle ! Sinon, ni elle ni moi n'aurions existé pour connaître Jésus et faire partie de son royaume ! !

Le Père emploie même des "retards" qu'il n'aurait pas voulus pour ajouter à ses bontés passées d'autres bénédictions nouvelles. Il sait changer le mal en bien.

 

LE PÈRE FAIT MISÉRICORDE S'IL LE VEUT BIEN.

Non seulement Dieu est omniscient mais il est aussi miséricordieux. Certes ! Mais parler ainsi des "attributs" de Dieu, c'est risquer de parler du "dieu des philosophes" au lieu de témoigner du "Père" de Jésus le Fils unique! Mieux vaut donc laisser parler les témoignages bibliques.

Au sujet de la date exacte de l'Avènement du Seigneur et de son royaume, "le Père seul sait" disait Jésus.

Au sujet du but ultime que le Père a le désir et se propose d'atteindre, c'est l'apôtre Paul qui nous dit ceci :

"Dieu a enfermé tous les hommes dans leur désobéissance pour leur faire à tous miséricorde" (Romains 11 . 32)

N'y a-t-il pas là deux traits contradictoires dans la personne du Père ? D'une part une souveraineté totale sur le calendrier et les horaires de l'avenir, d'autre part le projet et le désir de faire advenir finalement, en faveur de tous les humains, un "jugement de miséricorde" qui les sauvera tous ? La connaissance infaillible du Jour et de l'Heure de la "Fin du monde" est-elle compatible et conciliable avec cette miséricorde généralisée qui, elle, n'est nullement "prédite" mais que le Père a "derrière la tête", ou plutôt au fond de son coeur, comme l'incroyable "solution finale" à laquelle il travaille : l'acte final de grâce et de salut pour tous et pour chacun ? Comment, avec son Messie et par l'Esprit Saint, le Père pourrait-il être en même temps un "devin" au courant de la date "fatale" et le Sauveur totalement libre de bouleverser tous les pronostics et de modifier même les décisions qu'il a annoncées (cf. le livre de Jonas).

En réalité, ces contradictions-là existent-elles vraiment ? Non, elles perdent leur force dés qu'on cesse de se représenter de façon trop humaine aussi bien le pouvoir de prévision parfaite de Dieu que sa liberté de faire miséricorde en fin de compte.

En ce qui concerne la prescience parfaite que Dieu a de l'avenir, ne la concevons pas à la manière de nos prévisions mathématiques ou sur le modèle d'une horloge qui prévoit mécaniquement que, dans tant de secondes, les aiguilles seront placées à tel endroit du cadran. Réflexion faite et pour oser parler paradoxalement, j'en suis venu à penser que le Dieu vivant (notre Père) ne "sait" pas lui-même le jour et l'heure de son ultime intervention qui sera à la fois l'Avènement de son Christ et la fin du "siècle présent ": il ne " sait pas" en ce sens qu'il se réserve la totale liberté de décider ce Jour-là le moment venu, lorsqu'il estimera lui-même que c'est le bon moment.

Ce Dieu patient est le Dieu souverainement libre.

C'est donc bien tel jour et à telle heure de notre histoire, de notre temps humain (et non "dans un autre monde", comme on dit), que le ciel s'ouvrira pour laisser paraître le Sauveur du monde, le Messie ressuscité.

Mais ce moment-là n'est pas prévisible : il n'appartient qu'au Père, et même pas au fils. Ce qui ne veut pas dire qu'ils ne sont pas ensemble tous deux, Père et Fils, pour s'y préparer et le préparer ...

Et rien n'empêcherait non plus le Père, s'il le désire, de révéler par " prophétie" ou " inspiration" , à tel ou tel, qu'il "ne mourra pas avant d'avoir vu" le Seigneur arrivant dans sa gloire. Ne l'a-t-il pas fait pour ce Siméon qui a vu l'enfant Jésus nouveau-né, au Temple de Jérusalem (Luc 2) ? C'était "lorsque les temps furent accomplis" pour la première venue du Christ.

De même le moment arrivera où, pour la seconde et ultime Venue du Christ, "les temps seront accomplis", et les cieux s'ouvriront pour laisser soudain paraître, aux yeux de la création tout entière, le Messie juif ressuscité mais jusque là "gardé dans l'invisible de Dieu " (Actes 3 . 21).

Certes le signal avertisseur de l'imminence de ce Jour, sans plus aucune remise à plus tard, sera bien l'ébranlement vertigineux des forces cosmiques et l'effondrement des équilibres naturels qui assuraient la vie sur la terre (Luc 21 . 25-27 et 2 Pierre 3 . 10-13) : il faudra bien que terre et cieux "passent" et "disparaissent" pour que "paraissent" et "s'établissent un ciel nouveau et une terre nouvelle où la justice habitera ! De même il faudra bien que le "corps misérable" du chrétien disparaisse pour que le "corps glorieux" prenne sa place ! Et pourquoi le Saint Esprit, comme pour Siméon, ne préviendrait-il pas prophétiquement des chrétiens vigilants de l'imminence de cette Parousie ?

En tout cas, ce sont bien ces phénomènes bouleversants qui nous préviendront que le moment est venu de l'Avènement du Sauveur (cf Luc 21 . 25-27, 2 Pierre 3 . 12, etc.).

Car c'est bien en Sauveur et pour sauver que Jésus reviendra, cette fois "dans la puissance et la gloire" créatrices du monde nouveau :

" Celui que nous attendons comme Sauveur, le Seigneur Jésus Christ, viendra des cieux. Alors il changera notre faible corps pour le rendre semblable à son corps glorieux. En effet, il est assez puissant pour tout mettre sous son pouvoir." (Philippiens 3 . 20-21)

Oui, la Parousie de Jésus ne va pas être ce qu'on nomme communément le "Jugement Dernier" : elle sera le Salut définitif du monde entier. Car elle sera l'Acte final de la miséricorde du Père. Or le Père est impatient de "passer à l'acte", à cet Acte-là. Terriblement impatient ! Il y a en Dieu une "tension" dont nous n'avons aucune idée. Précisément parce qu'il est Amour et que cet Amour-là est une "passion" (la croix de son Fils), une "souffrance" (de père et de mère tout à la fois !) dont seules les paraboles et les figures symboliques des récits bibliques peuvent nous donner une idée. Je pense ici à l'histoire du patriarche Joseph, le fils de Jacob, dont nous parle le livre de la Genèse...

L'INDÉCISION DU PÈRE 

Peut-on parler d'une indécision en Dieu ? Ce serait ridicule si Dieu était "le dieu des philosophes", immuable et impassible.

Mais si notre Père est le Dieu et le Père du Fils unique, Jésus "le fils de Joseph le charpentier de Nazareth", alors on peut pressentir qu'il y a actuellement une indécision et une tension déchirante en Dieu :

--- d'une part il voudrait bien mettre fin tout de suite au règne immémorial de "Satan", des "puissances", du péché, des souffrances et de la Mort. Il le peut, à chaque instant prêt à dévoiler au monde entier son amour miséricordieux, à arrêter sa "colère".

--- mais d'autre part, il veut patienter encore ; il veut encore continuer à solliciter la repentance et l'amour de ses fils égarés ; il veut encore que le témoignage de ses fidèles accroisse le nombre des "fils du royaume", déjà rassemblés par Jésus dans le monde entier ; il est heureux de continuer à faire venir au monde ses merveilleuses petites créatures humaines de toutes couleurs qui naissent sous toutes les latitudes ; il voudrait que les fils d'Israël, par eux-mêmes et sans "voir" leur Messie, reconnaissent enfin leur Sauveur ..

Bref, entre deux appels intérieurs de son amour, il est sûrement déchiré.

Mais l'heure arrive où, comme cela s'est produit pour Joseph le fils de Jacob, " il ne pourra plus se contenir", il ne pourra plus cacher derrière sa colère les sentiments de miséricorde et le désir de salut qui bouillonnent dans son coeur, il se fera reconnaître.

Ah ! Vivement ce dévoilement, cette "apocalypse " ! En relisant cet " évangile" de Genèse 45, dites-vous que ce Joseph est non seulement "figure prophétique de Jésus" (Blaise Pascal le voyait admirablement) mais aussi "figure du Père". 

DIEU VA " CRAQUER "

Voici le dénouement bouleversant du face-à-face de Joseph et de ses frères :

"Alors Joseph, incapable de contenir son émotion devant les gens de son entourage, leur ordonna de sortir. Ainsi Joseph était seul avec ses frères quand il se fit reconnaître d'eux. Mais il pleurait si fort que les égyptiens l'entendirent, et que la nouvelle en parvint au palais de Pharaon. Alors Joseph dit à ses frères : "C'est moi, Joseph ! Mon père est-il encore en vie ? Ses frères furent tellement saisis qu'ils furent incapables de lui répondre Joseph reprit :

"C'est moi, Joseph, votre frère que vous avez vendu pour être emmené esclave en Égypte. Ne vous tourmentez pas et ne vous faites pas de reproches pour m'avoir vendu ainsi ! C'est Dieu qui m'a envoyé ici à l'avance pour que je puisse vous sauver la vie." (Genèse 45 . 1-5 et chap. 37 à 50)

Il vaut la peine de relire l'ensemble de ce récit pour saisir non seulement l'art littéraire de ce "suspense" dramatique mais surtout le sens prophétique de ce dénouement: le moment où Joseph "craque", brisé par l'émotion. C'est le moment où il est devenu "incapable de se contenir", dit le texte.

Il fallait que brusquement éclate l'incroyable tension qui, au plus profond de lui-même, l'écartelait ":

d'une part sa justice rigoureuse et sa colère légitime s'accompagnant de sa volonté d'amener ses frères à la repentance.

d'autre part son ardent désir de leur faire miséricorde, de pardonner leur crime, de se réconcilier avec eux et de les sauver ; tout cela à cause de son amour immense.

Comment faisait-il donc pour laisser sa juste "colère" durer si longtemps, pour dissimuler si longtemps son amour et sa miséricorde derrière le masque du juge implacable ? ! Et soudain, il "craque", laissant d'un seul coup exploser sa miséricorde en se faisant connaître tel qu'il est en vérité : "c'est moi ! C'est moi, Joseph ! Votre frère et sauveur "

Ne nous contentons pas de dire :" comme cette histoire finit bien ! !. Admirons plutôt la profondeur divine de cet amour qui rend le bien pour le mal et de cette miséricorde qui sait se servir même du crime subi pour faire retomber une pluie de bénédictions sur les criminels eux-mêmes.

Comment donc ne pas voir que le patriarche Joseph, fils de Jacob-Israël, est ici une éloquente figure prophétique de Jésus, de ce Jésus crucifié par ses frères mais qui, par sa mort elle-même, devient leur sauveur ? Si mes souvenirs sont exacts, c'est bien cela que notait Blaise Pascal dans ses Pensées.

Mais il me plaît aussi de discerner également en Joseph une "figure" de Dieu lui-même, une image très fidèle de ce que notre Père est, et de ce qu'il fait : sa miséricorde !

Les hommes, et son peuple témoin encore plus, lui font subir un calvaire : le supplice de son "Fils unique". Mais grâce à cette souffrance il donne à Israël et au monde entier un Sauveur éternel et un salut total.

Il se sert du rejet, par les chefs juifs, de leur propre Sauveur et Roi pour porter ce salut aux non-juifs au milieu de tous les peuples de la terre. Puis lorsque la majorité des juifs, s'endurcissant contre l'évangile qui leur est prêché, l'oblige à les endurcir et à les enfermer "sous sa colère", il n'en continue pas moins à se servir de cette désobéissance pour rassembler une foule innombrable de "païens" (les non-juifs) en les incorporant au "Reste" fidèle, sa "Jérusalem Nouvelle..

Mais l'heure vient où, soudain, le Père d'Israël va se dévoiler et se faire enfin reconnaître (comme Joseph !) par les siens. Il va le faire en faisant paraître son Messie "aux yeux mêmes de ceux qui l'ont transpercé ", afin que cesse leur aveuglement. Il va redonner à Sion son Roi, ce Roi que le Père cache et garde pour le moment dans son ciel, dans sa maison invisible.

Dieu aurait pu accomplir cet acte d'ultime miséricorde depuis longtemps déjà. Depuis le second siècle, ou au sixième siècle, ou au dix septième, ou au vingtième.... puisque le Messie Roi est "à sa droite" depuis son ascension ! Pourquoi ne l'a-t-il pas encore fait ? Plutôt que de chercher à répondre à cette question, pensons plutôt à la tension inimaginable qui est encore vécue dans le coeur de Dieu :

d'une part il désire ardemment donner le signal de la Parousie du Sauveur qui va faire Éclater sa miséricorde finale.

d'autre part le temps de sa "colère" contre Israël et contre toutes les nations n'est pas encore, à ses yeux, terminé (tout comme Joseph qui faisait si longtemps durer la mise à l'épreuve de ses frères).

Alors le Père met à profit ces "derniers temps "prolongés pour en faire entrer beaucoup d'autres, encore d'autres, dans le peuple messianique déjà rassemblé en "corps de Christ".

Tension en Dieu, débat intérieur en Dieu, indécision en Dieu, vrai drame "trinitaire" ( ?) ? Oui, comment fait-il pour "se contenir "? Comment fait-il pour ne pas "craquer" ? Comment peut-il ne pas déchirer les cieux et crier à tout Israël et au monde :"C'EST MOI "!

En vérité, il va le faire ! Bientôt ! Que de larmes de joie, ce Jour-là !

Georges SIGUIER . 14 rue Saint Jacques 81200 MAZAMET

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