L'oecuménisme
est dépassé....
extraits de la
lettre du pasteur Georges Siguier
:
"à mon ami
diacre de l'Église Catholique"
Faux oecuménisme,
illusoire espoir, prière vaine.
C'est
l'oecuménisme ecclésiastique qui à
mon avis, est dépassé et
périmé.
Tel est, cher ami, le
résumé de la réponse que je voudrais
donner à ta longue lettre : celle ci, en effet,
est un ardent plaidoyer en faveur de l'oecuménisme
pratiqué par les églises. En sens
contraire, je voudrais exposer un peu la pensée
suivante: cet oecuménisme "officiel" qui veut
faire avancer les Églises vers "une unité
visible et plénière" est un idéal
trompeur, un espoir illusoire et une vaine prière.
Pire: ces efforts oecuméniques détournent
l'attention des chrétiens, à la base, de la
réalité de l'unité ecclésiale
véritable, celle "du corps de Christ"..et de la
pratique fidèle de cette unité
là.
Le mot
"oecuménisme, est tellement galvaudé
et équivoque qu'il vaudrait mieux renoncer
à l'employer, même pour parler entre nous de
l'unité dans "l'Église." Celle-ci , si on
veut s'entendre mieux, serait mieux
désignée par l'expression "unité
ecclésiale". Du moins si l'on parle des relations
entre disciples de Jésus: relations d'amour entre
personnes (et non entre institutions), d'union, de
communion, de fraternité, de paix et
d'harmonie.
L'oecuménisme
idéaliste et utopique que les "grandes"
Églises veulent promouvoir et demandent à
Dieu pour un avenir lointain consiste en rapprochements,
accords et coopérations pensées et
organisées par les clercs, le clergé des
diverses Églises. C'est un oecuménisme
de juxtaposition au sommet, cherchant en vain
à se faire pratiquer par la base. Ce n'est
nullement une unité de communion, en chaque
localité ou vivent les disciples de Jésus,
là ou se trouvent les membres du
Christ.
C'est que ce mouvement
oecuménique se veut et ne se conçoit que
dans le cadre des Églises juxtaposées et
séparées, c'est à dire, dans cet
état de fait, cette situation de division et de
fragmentation qui n'est pas perçue comme un
péché intolérable à
abandonner tout de suite à tout prix. Chacune
de ces Églises se croit l'Église et tient
absolument à persister dans son existence: ses
dirigeants sont là pour ça!
Et le malheur, c'est que
ces grandes Églises établies s'entendent
pour essayer de contrôler et de gérer
ensemble leur oecuménisme. Elles s'entendent
à merveille dès qu'il faut gronder et
dénoncer les non -alignés et
déviants qui se permettent de ne pas respecter les
règles du jeu.
Je pense, cher ami, que
ta lettre parle de cet oecuménisme là
lorsqu'elle célèbre les mérites des
"accords oecuméniques",quand elle loue
l'oecuménisme des groupes de prière
oecuméniques ou qu'elle relativise l'hiver
oecuménique qui gèle la marche en avant
vers l'unité.
Il y a en fait
malentendu sur l'Église:
Les uns veulent arriver
à réunir les Églises; les autres
pratiquent tout de suite l'unité dans
l'Église (qui est une et indivisible).
Entre les deux,
d'où vient la contradiction? Elle provient d'un
quiproquo: on joue sur les mots, sur le mot
Église. Tantôt on parle de
l'"Ecclesia" au sens du nouveau testament: le
rassemblement du peuple messianique de Jésus,
l'unique "corps" (très visible!) du Christ, le
Temple saint, le Troupeau...Tantôt, en employant le
même mot "Église", on parle d'une
dénomination ecclésiastique parmi
d'autre, par exemple l'Église Catholique romaine,
l'Église Réformée de France,
l'Église Luthérienne d'Alsace et
c....Chacun de ces ensembles nationaux ou mondiaux se
pose comme Église à coté ou en
face des autres Églises. Le malentendu (
souvent savamment entretenu!) saute aux yeux de tout le
monde: l'Église dont parle le nouveau testament,
ce n'est pas vraiment la même chose que l'une ou
l'autre des Églises!!!
Comment
faire?
On ne peut pas renoncer
au mot "Église"! Eh bien, qu'au moins chacun
veille à ne pas être dupe, à ne pas
tricher sur "la rectitude des désignations" comme
disent les linguistes, à ne pas égarer les
brebis du Seigneur!
Pour ma part je tente
d'employer le mot "ecclésiastique" quand je veux
désigner les Églises dénominations,
grandes ou minuscules; et je réserve le mot
ecclésial pour parler de l'Église au sens
qu'apôtres et évangélistes du 1°
siècle donnent à ce terme. J'essaye
même de mettre entre guillemets le mot
"Église" quand je tente d'éviter toute
confusion entre nos organismes ecclésiastiques
d'aujourd'hui et l'Épouse unique du Christ
Jésus, le cep dont nous sommes tous les
sarments,la saint Église universelle de
Dieu.
N'en va t'il pas de
même avec le mot "Catholique"? Bien sur dans son
étymologie, ce terme équivaut à peu
près à universel. Mais le séculaire
détournement de sens qu'a fait subir à ce
concept la chrétienté romaine d'occident
continue de plus belle à sévir aujourd'hui,
chaque fois qu'on fait réciter le credo dans les
assemblées eucharistiques. Et qui entretient le
malentendu sinon nous, les prédicateurs et
pasteurs? Crois tu que ce soit sans dommage spirituel, et
sans importance pour l'unité ecclésiale
entre nous? Et l'unité de communion ne
consiste-t-elle pas à se "parler vrai"?
..................................
Je l'avoue, ton
enthousiasme devant les réalisations
récentes, locales et internationales, dans la
marche en avant vers l'unité me fait sourire un
peu. Il y a bien longtemps qu'existent rencontres et
dialogues entre prêtres, pasteurs, diacres..et
rabbins. J'en ai presque soixante ans
d'expérience!
Quant aux accords et
ajustements doctrinaux, tu ne devrais pas les fêter
comme de nouvelles Pentecôtes. Par exemple cet
accord entre luthériens et catholiques sur "la
justification par la foi": après trente ans de
travail oecuménique ne vient de voir le jour que
pour se heurter aux nettes réserves du
Vatican!
D'ailleurs, en quoi
les chrétiens de la "base", comme toi et moi et
les pauvres de YHWH dont nous prenons soin, sont ils
concernés et intéressés par ces
documents? N' en est il pas de même de ce vieux
texte d'accord, le B.E.M. (baptême, eucharistie,
ministère)? Comme tout cela est
dépassé, périmé, usé
et vieilli! A la place pourquoi ne pas se mettre
ensemble, nous les bergers de chaque localité,
pour écouter et entendre, et pratiquer " ce que
l'Esprit dit aux églises " à propos de ces
divers domaines de notre pastorale dont Il est le seul
chef et le seul magistère
Au fond, tu n'es pas
assez désespéré, parce
que...........parce que tu es dans la hiérarchie
de ton "Église" .Désespéré de
ton Église, des Églises et j'ose même
dire de l'Église! Faute de ne compter que sur le
Maître et lui seul. Lui que la gloire de
l'Église occulte et éclipse si souvent et
de tant de façons! Lui dont l'avènement
proche est si peu attendu et voulu par l'Église et
par nous les guides de nos frères! Et pourtant,
là seulement est notre unité
plénière, totale et définitive,tu le
crois comme moi.
Au milieu de ta lettre,
en effet, j'ai remarqué un grief, un reproche que
tu nous adresses, à moi et à mes
frères et soeurs qui pratiquons avec
entêtement ce que tu appelles l'intercommunion.( le
mot communion suffit pour dire la chose)
Oui,
depuis plusieurs années, nous sommes ici quelques
uns (catholiques,
réformés,évangéliques,anglican
..) à nous unir dans "le repas du Seigneur" ou
"agapés pascales," en une pleine et totale
communion eucharistique, semaine âpres semaine.
Nous ne tenons pas compte des positions
théologiques des "Églises ( que nous
connaissons pourtant fort bien ) et nous passons outre
aux désapprobations fermes et
répétées de nos confrères qui
dirigent ces diverses "Églises". Nous estimons
pourtant agir en "Église" et sans contrarier ni le
Seigneur Jésus ni la tradition des apôtres
et témoins................
Les
chrétiens que nous sommes , en convivialité
avec Jésus, ne provoquent aucune division dans
l'Église et ne créent absolument pas une
dénomination nouvelle: ils abolissent au contraire
toute division entre eux, et surtout cette division
eucharistique que tu voudrais leur imposer à
nouveau, pour les séparer de nouveau les uns des
autres!
Quant à notre
"protestantisation" supposée, je m'écrie:
à bas le protestantisme! si protestantisme il y a,
dé-protestantisons encore plus
énergiquement....pour encourager les clercs
catholiques de leur coté, à
dé-catholiciser leur "Église, leur
eucharistie et leurs sacrements......
Condamnés
à être protestant,à
perpétuité.
Tu écris,.. que
l'oecuménisme de nos communions eucharistiques
n'est pas un "véritable oecuménisme" mais
seulement un oecuménisme "à la façon
protestante".
Plaise à Dieu que
mes confrères, pasteurs protestants, en viennent
vite à cette façon protestante de vivre
l'unité locale!! Ils n'en prennent pas le chemin,
et s'appliquent au contraire à se
désolidariser et à se démarquer de
ces aventures d'"enthousiastes" plus "cathares" ou
"anabaptistes" que "protestants".
D'autre part, je
comprends qu'à tes yeux les frères et
soeurs catholiques qui prennent part à ces
communions y sont piégés, séduits et
déviés par la façon protestante qui
prévaut en ces rencontres. C'est à eux de
te répondre, bien sur, car je ne suis ni leur
prêtre, ni leur directeur de conscience. Mais, pour
moi même, je ne veux pas balayer d'un revers de la
main l'interpellation qu'à travers ta lettre le
Seigneur continue de m'adresser: "En coopérant
activement à ces "agapes "en mémoire de
moi, es tu réellement mon serviteur ou es tu un
instrument de l'Église protestante et de la
théologie réformée?"
Oui, c'est là la
vraie et grande question. Nous les serviteurs et les
servantes de Jésus et de son Évangile,nous
ne pourrons jamais nous dérober à cette
question, dans tous les domaines de notre
ministère: "suis je serviteur du Maître
ressuscité et présent, ou bien suis je un
rouage, une courroie de transmission ou un fonctionnaire
de "l'Église " dont je dépends?
Prétendre que les deux choses sont
équivalentes témoignerait d'un aveuglement
spirituel tout proche de l'idolatrie. Mais l'Esprit Saint
bien sur nous en
préserve.........................
L'oecuménisme des
prêtres et des pasteurs, y compris de ceux qui sont
préposés aux relations oecuméniques,
dépasse rarement le niveau d'une simple
"ouverture" oecuménique. En fait les uns et les
autres sont et restent d'abord et avant tout les
gardiens, les zélateurs de
l'ecclésiologie de leur "Église"!
Comment pourraient ils faire pratiquer à "leurs
laïques" une unité ecclésiale qu'ils
ne pratiquent pas eux mêmes, trop occupés
qu'ils sont à "enraciner" leurs fidèles
dans leur propre église particulière! Ils
gémissent ensuite quand ils voient que la "base",
en bas, ne suit pas les conseils élaborés
en haut, du bout des lèvres. Et ils ne crient
à la division que lorsque quelques rares
non-conformistes transgressent sans crainte leurs accords
de façade "théologiquement corrects". En
vérité les progrès de l'unité
fraternelle entre nous, à la base, n'existent que
là ou, par amour du Christ lui même, on ose
prendre quelque distance par rapport aux bergers et
théologiens des "Églises". Sans pour autant
cesser de les aimer, de les respecter et de leur
obéir ( là ou ils ne
désobéissent pas au maître!
...........
Tu nous invites
à la patience:
Comment ne pas
répondre "Amen" lorsque c'est la parole du
Seigneur qui nous invite à l'endurance, à
la persévérance et la patience au milieu
des tribulations et des épreuves suscités
par ceux du "dehors" mais aussi par ceux du
"dedans".
Pourtant toute
invitation à la patience est elle bonne et de bon
aloi? Par exemple lorsque les riches et les forts
invitent à la patience les pauvres et les faibles
qu'ils écrasent, qu'est ce qui se cache
derrière cet appel en apparence si vertueux? Et
s'il en était ainsi en matière
d'unité dans l'Église, une et sainte,
de Jésus Christ
..........................
Patience, patience; au
premier abord je suis tenté d'acquiescer à
de tels conseils en apparence si
évangéliques. Mais en y regardant de plus
près, on voit bien ce qui se cache derrière
l'ambiguïté du propos. On veut me faire
confondre la vraie patience chrétienne,qui
respecte la liberté de Dieu et sa façon
d'agir comme il veut et quand il veut, avec cette
patience passive et coupable qui maintient en statu quo
détestable aux yeux de Dieu, qui renonce à
la repentance impérativement prescrite par
Dieu,qui cherche à gagner du temps là ou
Dieu dit :"tout de suite!" et qui lasse la patience de
Dieu, provoquant sa colère.
Or adhérer
à "la patience "des églises bien
établies et à "leur espérance"
oecuménique vers une unité
chrétienne possible et souhaitable revient pour
moi à ne pas vouloir arrêter,
immédiatement, ma contribution personnelle au
péché collectif de division, de
cloisonnement, de fragmentation et d'éparpillement
de l'assemblée sainte du Seigneur, dans la
localité ou elle vit et ou je vis. Fausse
patience, lâche tolérance, triste
complicité avec le
Diviseur..................................
Aujourd'hui
la pratique locale et répétée de
l'unité ecclésiale me fait de plus en plus
partager la critique et la désillusion de tous
ceux qui décèlent une fausse patience et
une espérance trompeuse dans l'oecuménisme
des "Églises"
Mais c'est la joyeuse
expérience de la pleine unité
ecclésiale vécue à la base qui m'a
rendu encore plus lucide et clairvoyant que dans le
passé.
Il y a 10 ans encore,
je n'osais pas m'avouer à moi même et encore
moins affirmer publiquement que
la
dénomination, que toute dénomination
ecclésiastique est un péché à
répudier, car elle est précisément
la force de division qui maintient les chrétiens
séparés, là ou Dieu lui même
ordonne:"que
l'homme ne sépare pas ce que Dieu a uni
!"
Georges
Siguier
Ne
serait-il pas urgent pour les chretiens des diverses
confessions d'essayer d'avancer vers une communion
pratique, concrète, sincére et
véritable le regard fixé sur le Christ, sa
manière d'être, de vivre et
d'agir.
Le
regardant nous pourrions commencer une réforme de
nos comportements, de nos pratiques institutionnelles:
une prédication commune avec partage de la parole
dans des batiments communs, La célébration
de la Cène, eucharistie ensemble avec partage du
pain et du vin. Reconnaissance des ministères et
cheminement vers le choix des ministres par les
communautés de quartier et pour un temps
déterminé comme nous y invite Paul en 1
Timotée au châpitre3. Et c......Chemin
prophétique...qui serait anticipation de notre
union à la Parousie autour du Christ. Autant
s'y préparer à l'avance.
Edmond
Savajol mai 2010